RÉSUMÉS DE CONFÉRENCE

La pratique du français à l’île Maurice : une volonté d’urbanisation
ou phénomène lié aux mobilités d’expatriation et du tourisme ?
Priscille Ahtoy
Université de Tours
La ville ou certains endroits considérés comme huppés peuvent parfois être conçus comme des constructions sociales produites par certaines pratiques langagières ou discours. Comment les manières de parler ou les discours participent à produire la ville ou des espaces urbains ou encore comment les imaginaires spatiaux produisent des modèles langagiers attractifs ?
Peut-on considérer certains lieux de loisirs: restaurants, cafés, magasins de luxe, centres commerciaux, instituts de beauté comme faisant partie d’une volonté d’urbanisation, d’un mode de vie tendant vers un style urbain avec des pratiques langagières valorisées ? De quelle manière les pratiques langagières participent-elles à produire la ville ou à en faire un microscosme urbain au sein d’un milieu rural ?Afin d’illustrer cette construction sociale produite par les manières de parler, nous étudierons l’évolution des modèles langagiers du français au sein du terrain plurilingue de l’île Maurice au cours de ces dernières années. L’arrivée de Sud-Africains et de Français expatriés a renforcé les pratiques ségrégatives dans la structuration de l’espace mauricien, comme en témoignent les travaux sur les langues et l’espace (Yannick Ballah-Bosquet, Rada Tirvassen).

Dans un premier temps, nous brosserons le paysage sociolinguistique de l’île Maurice. Puis, nous tenterons de définir la place qu’occupe le français dans cet espace plurilingue. Enfin, nous montrerons que l’usage du français est étroitement associé aux mobilités sociales (et géographiques).

La démarche méthodologique se fera par le biais d’enquêtes qualitatives (observations participantes, récits de vie et d’expérience et entretiens semi-directifs d’un échantillon varié, commentaires d’internautes sur le sujet). En tant que chercheure issue du terrain, nous tenterons de montrer comment on peut analyser et comprendre ces constats de bi-plurilinguisme, de glottophobie, de légitimité et leurs liens avec les représentations langagières, mobilités et urbanisation.

Cette contribution vise à mettre en lumière les productions langagières liées à l’espace sur un ancien territoire français et à faire apparaître une certaine domination implicite et une violence symbolique liées à la pratique de la langue française.

Bibliographie
Carpooran, A. 2009. Urbanité et diglossie à Maurice : survol diachronique et description synchronique. In : T. Bulot (dir.) Sociolinguistique urbaine des zones créolophones. Revue de sociolinguistique et de sociologie de la langue française 34(2) : 129-144. Bruxelles : EME.
Bosquet-Ballah, Y. 2017. Une relecture de l’espace des langues en contexte mauricien. Cahiers Internationaux de Sociolinguistique 2(12) : 227-255.
Calvet, L.-J. 1994. Les voix de la ville, Introduction à la sociolinguistique urbaine. Paris : Editions Payot et Rivages.
Jauze, J.-M. 2009. Bel-Ombre (Maurice) : un village sucrier à l’ère du tourisme intégré. Les Cahiers d’Outre-Mer. Revue de géographie de Bordeaux. 129—134. ISSN 0373-5834.
Pierozak, I. 2000. Les pratiques discursives des internautes. Le français moderne 1 : 109-129.


Qu’est-ce qu’être citadin aujourd’hui à Kidira ?

Ordre social juvénile et reconfigurations sociolinguistiques au sein d’une jeune ville sénégalaise
Michelle Auzanneau,
Université Paris Cité, IRD, Ceped, Institut Convergences Migrations
Adama Ba,
Université Paris Cité, IRD, Ceped

Kidira, située dans la région de Tambacounda, à la frontière du Mali et à plus de 600 km de la capitale sénégalaise, a acquis le statut de commune en se détachant de la communauté rurale de Bélé en 2008. Cette évolution administrative a eu lieu dans le contexte de mutations profondes de Kidira qui, se développant et se diversifiant sur un plan économique, repoussant aux frontières de la ville les activités traditionnelles, comme l’agriculture, l’artisanat et l’élevage, s’est étendu géographiquement et a vu sa population quintupler en 20 ans. Dans ce contexte, l’adoption du wolof dans cette zone plurilingue depuis longtemps dominée par le peul, a considérablement augmenté. Elle est favorisée par les jeunes générations pour les valeurs d’urbanité et de modernité du wolof décrites par de nombreux travaux antérieurs au Sénégal, dont ceux de LJ. Calvet et ses équipes (Calvet 1985 ; Juillard 1995) ou continuateurs. A Kidira, cette langue parlée majoritairement par les migrants venus des autres régions et avec lesquels les jeunes sont en contact quotidien, bénéficie également d’un prestige social lié à une certaine réussite économique des migrants wolofophones. Socialisées dans un environnement très différent de leurs aînés, les jeunes générations kidiroises ne trouvent pas chez ces derniers les modèles langagiers et comportementaux associés à la ville. L’observation des pratiques et des discours de jeunes réunis au sein de groupes de pairs (jotays) ou de leurs familles rendent compte d’une orientation socio-spatiale (Auzanneau & Trimaille 2017) tournée vers les villes extérieures à Kidira, notamment vers la capitale. La mobilité vers les villes, surévaluée, est vue comme une épreuve socialisante incontournable, capable de rehausser le statut social d’une personne quelle que soit sa position économique, son lieu de vie, son ethnie ou même sa caste. L’activité catégorielle de jeunes kidirois révèle la façon dont ils définissent et hiérarchisent des espaces socio-géographiques internes ou externes aux frontières de Kidira ainsi que les acteurs sociaux qui les habitent ou les traversent. La connaissance du wolof ou la manière de parler cette langue jouent un rôle central dans la production de cet ordre social juvénile (Eckert 2004), elles situent les locuteurs sur un axe socio-temporel défini en fonction de l’évolution de Kidira mais aussi d’une conception courante du développement. Dans un contexte de mutations rapides, où des reconfigurations sociales et sociolinguistiques sont en encore cours, habiter la ville ne suffit pas pour être considéré comme un jeune citadin, encore faut-il en adopter les manières. Les pratiques langagières et l’activité catégorielle des jeunes kidirois apportent donc des éléments de réponse à la question : qu’est-ce qu’être citadin aujourd’hui à Kidira ? Notre communication s’appuiera sur le corpus de thèse d’Adama Ba composé d’interactions quotidiennes au sein de groupes de pairs jeunes, d’observations d’interactions familiales et d’entretiens semi-directifs dont des entretiens embarqués.Cette proposition s’inscrit dans l’axe 1 ou l’axe 2.
Références bibliographiques
Auzanneau, M. & Trimaille, C. 2017. L’odyssée de l’espace en sociolinguistique. Langage et Société, double numéro spécial 160-161 : 349-367.
Calvet, L.-J. et collab. 1985. Rapports de mission à Ziguinchor (Casamance). Paris : CERPL, Université René Descartes.
Eckert, P. 2004. Variation and a sense of place. In: C. Fought (éd.) Sociolinguistic variation: Critical reflections.
New York, Oxford: Oxford University Press. 107-118.
Oppenchaim, N. 2011. La mobilité comme accessibilité, dispositions et épreuve : trois paradigmes expliquant le caractère éprouvant des déplacements à Paris. Articulo – Journal of Urban
Research [online], 7, p.1-7 http://journals.openedition.org/articulo/1767; DOI: https://doi.org/10.4000/articulo.1767


Engouement croissant pour l’anglais chez les étudiants libanais : motifs et corollaires
Paulette Ayoub
Université Libanaise et Université de Balamand – Liban

Le territoire libanais se caractérise par la coexistence de plusieurs variétés linguistiques de différents statuts. L’arabe standard (variété haute et savante) est la langue officielle, la langue de l’administration et de l’enseignement. L’arabe dialectal ou l’arabe libanais (une variété orale, non codifiée par écrit) sert à la communication sociale et aux échanges quotidiens. Le français et l’anglais sont deux langues étrangères enseignées dans tous les établissements scolaires. La plupart des écoles libanaises sont des écoles francophones où la langue française jouit de propriétés particulières constituant le médium d’enseignement/ apprentissage des disciplines scientifiques (chimie, physique, mathématiques et sciences de la vie) alors que l’anglais y acquiert le statut d’une deuxième langue étrangère enseignée au cycle primaire dans les écoles privées et au cycle complémentaire de l’école publique.Au nord du Liban, le district de Zgharta1 renferme une quarantaine d’écoles, publiques et privées, dont 95

% sont francophones. Pourtant, une fois leur bac en poche, plusieurs élèves de cette région optent pour des

universités anglophones, ou même des cursus anglophones au sein d’institutions supérieures francophones.

Cela nous amène à poser la question suivante : Pourquoi cet engouement croissant pour l’anglais qui laisse insinuer une certaine fracture entre l’apprentissage du français à l’école et la pratique de la langue de Molière à l’université ? Quels en sont les effets sur « l’environnement linguistique » dans la vie sociale urbaine ?

Pour pouvoir répondre à ces questions nous entamerons une enquête de terrain qui consiste à réaliser des entretiens semi directifs avec les universitaires (une trentaine) qui ont opté pour l’anglais, comme langue d’apprentissage à l’université, et à enregistrer des conversations quotidiennes entre les jeunes dans des différents lieux (restaurants, magasins…) pour analyser les alternances codiques et les emprunts. Enfin, nous analysons les langues utilisées dans la rédaction des pancartes, des écriteaux, des menus des restaurants, des affiches publicitaires, des enseignes des magasins au sein de cette région pour mettre en relief l’environnement linguistique de la ville.

Nous nous appuierons dans l’analyse de notre corpus sur les travaux de Jean-Louis Calvet (1994, 2009, 2016), Marielle Rispail (2006, 2012, 2014, 2022), Danièle Moore (2010), Bernard Py (2000), Catherine Kerbrat-Orecchioni (2005) et sur beaucoup d’autres.

Bibliographie
Calvet, L.-J. 2009. La sociolinguistique. Presses Universitaires de France. https://doi.org/10.3917/puf.calve.2009.01
Rispail, M. (dir), C. Jeannot, S. Tomc & M. Totozani 2012. Esquisses pour une étude plurilingue, Réflexions didactiques, Paris : Harmattan
Moore, D. 2010. Les représentations des langues et de leur apprentissage, France : Didier.
Py, B. 2000. « Représentations sociales et discours. Questions épistémologiques et méthodologiques »,
Tranel 32 : 5-20.
Kerbrat-Orecchioni, C. 2005. Le discours en interaction. Paris : Armand Colin.


Le caza_de_Zgharta, district du Gouvernorat du Nord au Liban, abrite une population estimée à environ 100 000 personnes, pour
une superficie d’environ 800 km2. Le district englobe 57 villages, avec 30 municipalités qui couvrent 37 villages. Le chef-lieu du
caza est la ville du même nom, Zgharta ou Zghorta.


Immune cities: discourses on Covid-19 in the Italian linguistic landscape
Carla Bagna
University for Foreigners of Siena
Martina Bellinzona
University for Foreigners of Siena

The study of the linguistic landscape (LL) focuses on the representations of languages on signs placed in the public space, as well as on the ways in which individuals interact with these elements. Regulatory, infrastructural, commercial, and transgressive discourses (Scollon & Scollon 2003), among others, emerge in these spaces, overlapping each other, complementing or opposing, reflecting changes taking place and, in turn, influencing them.The Covid-19 pandemic has affected all the aspects of life, including cities, neighbourhoods, and spaces in general (Marshall 2021). Against this background, the study of the LL appears to be fundamental to better understand not only the ways in which places have changed and how people are interpreting and experiencing them (Stroud & Mpendukana 2009), but also to analyse the evolution of Covid-19 discourses since the pandemic broke out to today.

This contribution aims to investigate how and in what terms the Covid-19 pandemic had an impact on the Italian LL, considered both in its entirety, as a single body which, regardless of local specificities, responded and jointly reflected on the shared shock, both specifically, assuming the city of Florence as a case study. Florence, the capital of the Tuscany region, has been subject for years to touristification processes (Gotham 2005): these processes have led to the transformation of several neighbourhoods of the city, especially in the historic centre, further changed today due to the pandemic.

With the purpose of investigating the manifestations of the Covid-19 discourse in the LL, looking both at the differences between public and private discourse, and at the different representations that characterized the main phases of the pandemic, different types of data were collected from March 2021 to November 2022 and then triangulated. They include, in the first place, visual data from the urban LL and from the cyberscape, analysed in a quantitative, qualitative, and comparative manner. In the second place, questionnaire and online focus groups, aim at exploring citizens’ perceptions and awareness of changes in the LL of their city, analysed through Qualitative Content Analysis (Mayring 2004) with the software NVivo 11.

The results obtained showed how, to the strong citizens’ sensibleness of the functional distinction of neighbourhoods, corresponds a total lack of awareness of the linguistic differences and semiotic manifestations displayed in the LL. Instead, it turned out to be a heterogeneous space and in which neighbourhoods’ differences are reflected in stratified and multi-layered practices. Furthermore, the diachronic analysis made it possible to identify different discourses related to the pandemic, which range from resilience, tolerance, hope, solidarity, and patriotism, to disillusionment, despair and protest.

Bibliographie
Gotham, K. F. 2005. Tourism gentrification: The case of New Orleans’ vieux carre (French Quarter). Urban studies 42(7): 1099-1121.
Marshall, S. 2021. Navigating COVID-19 linguistic landscapes in Vancouver’s North Shore: official signs, grassroots literacy artefacts, monolingualism, and discursive convergence. International Journal of Multilingualism 1-25. DOI: 10.1080/14790718.2020.1849225
Mayring, P. 2004. Qualitative content analysis. A companion to qualitative research 1(2): 159-176. Scollon, R., & Scollon, S. W. 2003. Discourses in place: Language in the material world. London: Routledge.
Stroud, C., & Mpendukana, S. 2009. Towards a material ethnography of linguistic landscape: Multilingualism, mobility and space in a South African township. Journal of Sociolinguistics 13(3): 363-386.


Discours discriminatoires en-ligne et phénomènes migratoires
Fabienne Baider
Université de Chypre
Notre présentation est consacrée aux discours migratoires en ligne et en particulier aux stratégies implémentées pour répondre à des discours haineux. Nos données comprennent 15 000 messages Facebook qui ont été annotés à la fois comme discours de haine ou comme contre discours. Nous donnons des résultats d’analyse quantitative (statistiques) et qualitative (analyse de discours), nos analyses étant ancrées dans l’analyse critique du discours (Fairclough 1995). La dernière section analyse nos résultats à la lumière d’autres recherches et explique pourquoi certaines stratégies recommandées par les spécialistes (Benesch 2014), ne font qu’alimenter la violence verbale. Nos données proviennent de projets européens dans lesquels nous avons été impliquées, à savoir les projets européens dépendant de la Direction générale de la justice sociale (DGJS), les programmes C.O.N.T.A.C.T. et IMsyPP.Références bibliographiques
Benesch, S. 2014. Countering dangerous speech: New ideas for genocide prevention. Washington, DC: United States Holocaust Memorial Museum. Retrieved from http://www.ushmm.org/m/pdfs/20140212- benesch -countering-dangerous-speech.pdf
Fairclough, N. 1995. Critical discourse analysis. The critical study of language. London: Longman.


La sociolinguistique urbaine entre Louis-Jean Calvet et Thierry Bulot.
Regard d’un compagnon de route
Philippe Blanchet
Université Rennes 2 – CELTIC-BLM
Lorsque l’on s’intéresse aux liens entre sociolinguistique et ville, deux noms de chercheurs brillent tels des phares : Louis-Jean Calvet et Thierry Bulot. Leurs approches, et leurs conceptions mêmes, de l’étude sociolinguistique de la ville et des villes sont nettement différentes. Ayant été de façons différentes compagnon de route de ces deux grands chercheurs, lecteur assidu et parfois collaborateurs de leurs travaux, je soulignerai, de mon point de vue, ce qui caractérise distinctement mais aussi ce qui rapproche leurs travaux. Rappelant quelques-uns de leurs apports principaux, je proposerai de les mettre en perspective face à des changements sociaux en cours afin d’envisager des lignes de développement de leurs travaux pour l’avenir.

Migrations circulatoires et pratiques langagières :
le cas d’une population afro-descendante d’Amérique Centrale : les garifuna honduriens.
Stéphanie Brunot
Université de Paris-Cité, laboratoire Ceped Centre-Population et Développement
Les circulations migratoires (Deprez 2006) entre le Triangle Nord d’Amérique Centrale et les Etats- Unis se sont accentuées ces dernières années avec le phénomène des « caravanas » (Castillo 2019 ; Duterme 2022). 500 000 migrants tenteraient chaque année leur chance vers les Etats-Unis. Parmi eux, la migration forcée des jeunes de 15 à 24 ans représente une part exponentielle, 60% (OIM 2019). Les phénomènes des « caravanas », organisés pour la plupart au départ de San Pedro Sula, ville du Honduras, permettent de questionner l’effet des pratiques spatiales des migrants « en transit » (Counilh & Simon- Laurière 2011) dans les espaces urbains de « villes-étapes » (San Pedro Sula, Ciudad de Guatemala, Ciudad de Mexico et Tijuana) qui jalonnent leurs parcours migratoires, sur leurs pratiques langagières. Nous nous intéresserons à une population minoritaire et minorisée du Honduras : les garifuna, dont l’héritage et la transmission de la langue sont remis en question par les migrations de cette population vers les Etats-Unis (Brunot 2021). Ces migrants garifuna mettent en place des stratégies d’appropriation des langues dominantes, l’espagnol et l’anglais, pour faciliter leurs parcours migratoires. A partir de leurs témoignages (FOSDEH & Casa Alianza 2021), nous nous intéresserons à leurs représentations des villes-étapes durant leurs parcours migratoires, en questionnant la notion de la temporalité du « transit migratoire » dans leurs discours. Une temporalité, marquée par des étapes de mobilité, d’immobilité voire de rupture tout au long du parcours et qui vient redéfinir les fonctions de ces espaces urbains accueillant des migrants, qui s’y insèrent et y deviennent des habitants temporaires. Nous discuterons la question de la visibilité mais aussi de la marginalité de ces migrants dans ces villes car si le regroupement en « caravanas » assure une protection et une visibilité auprès de l’opinion publique, celle-ci expose aussi les migrants à des actes de répression violents de la part des autorités qui dispersent ou contiennent dans des camps, ou institutions, ces groupes de migrants ; des mesures accentuées par l’externalisation des frontières des Etats-Unis en Amérique Centrale (Castillo 2019 ; Iborrat Mattent 2021).

Legacies of conflict, cosmopolitan spaces & diasporic discourses: comparisons between the Sri Lankan Tamil and Greek-Cypriot diasporas
Constadina Charalambous
European University Cyprus
Lavanya Sankara
King’s College London

This paper seeks to understand the role of conflict legacies and conflict discourses in processes of becoming/forming diasporic communities and sustaining diasporic bonds. Comparisons will be drawn between the Sri Lankan Tamil (SLT) diaspora and the Greek-Cypriot diaspora in London, an urban cosmopolitan environment, drawing on two linguistic ethnographic projects that focused (amongst others) on second generation migrants’ experiences of becoming a diaspora. In order to avoid regarding each of these diasporas as homogeneous groups, both projects adopted a theoretical framework that views diasporas as social and communicative practice and analyse them as a discursive and affective project (Brubaker 2005).To explore how diasporic imaginings could change and be reproduced over time, in our comparisons we examine what role language socialisation has in shaping discourses, relations and affective stances, taking into account factors related to intra-group dynamics and varied migratory trajectories. This is important given that diasporas are not always formed as a direct outcome of migration movements and that it is possible to become a diaspora through developing a new imagination of a community, even many years after the migration/s took place (Sökefeld 2006: 267-268). In addition, we analyse discourses related to themes such as identity, home, belonging and involvement in socio-political action. Since such action is not easily measurable or quantifiable (Østergaard-Nielsen 2001), mapping the second generation SLT and Greek-Cypriot diaspora’s understandings of violent conflicts in their countries of origin and how they interact with the participants’ experiences in a multi-ethnic metropolis, would provide depth into the ‘fluidity’ that has come to be synonymous with the diasporic experience (Van Hear 2014:185-186).

References
Brubaker, R. 2005. The ‘diaspora’ diaspora. Ethnic and Racial Studies 28 (1): 1-19.
Østergaard-Nielsen, E. 2001. The politics of migrants’ transnational political practices. WPTC-01-22. Paper presented to the conference on Transnational Migration, Comparative Perspectives at Princeton University, 30 June-1 July.
Sökefeld, M. 2006. Mobilizing in transnational space: A social movement approach to the formation of diaspora. Global Networks 6(3): 265-284.
Van Hear, N. 2014. Refugee, diasporas and transnationalism. In E. Fiddian-Qasmiyeh, G. Loescher, K. Long & N. Sigona (eds). The Oxford handbook of refugee and forced migration studies. 1st ed. Oxford: Oxford Univesity Press. 176–187.


Le parler urbain de la ville de Tunis : Continuum, variations en action ou modèles multidimensionnels de la variation ?
Raja Chennoufi-Ghalleb
Université de Tunis El Manar

Les mutations sociopolitiques récentes, l’avènement de la révolution tunisienne de 2011 et le processus de globalisation ont entraîné des mobilités spatiales des locuteurs régionaux vers les espaces urbains, notamment vers la capitale ; Tunis, ‘’lieu de brassage et de transition’’ (Calvet 1994), induisant delà, une réorganisation socioculturelle urbanistique et linguistique ainsi qu’une dynamique des représentations sociolangagières et des discours épi linguistiques.Emanant d’une enquête de terrain d’ordre longitudinal1 (en cours) focalisée sur l’espace urbain, lieu privilégié de nos observations, notre contribution tentera d’observer la reconfiguration des répertoires langagiers et d’analyser la redistribution des pratiques et des identités sociolangagières induisant une redistribution des normes et des pouvoirs dans un contexte post-révolutionnaire, de mobilité sociale, de mondialisation, un contexte socio-politique et économique entre mutations et tensions permanentes. D’un point de vue méthodologique, le corpus relatif à l’enquête est essentiellement d’ordre qualitatif, l’échantillon est constitué d’une trentaine de locuteurs/trices appartenant à trois générations différentes qui correspondent respectivement aux trois phases de migrations internes socioéconomique et sociolinguistique qu’a connu le pays (entre les années 60 et 2022), soit 10 enquêtés par phase.

C’est donc en partant d’une approche spécifique relative à la reconfiguration des répertoires langagiers, aux mécanismes qui président à la déconstruction/construction d’une ‘’identité discursive’’ (Charaudeau 2001) et à la spécificité des pratiques linguistiques urbaines et régionales dans leur rapport à l’espace urbain de la ville de Tunis que se cristallisera l’objectif de ce travail. S’intéresser à l’impact des mobilités socio-spatiales sur la reconfiguration des répertoires linguistiques et sur la dynamique des représentations sociolangagières en action et les discours épilinguistiques, c’est s’interroger plus largement sur la transition langagière et spatiale du modèle centre/périphéries, capitale/régions, sur le processus de confinement/ dé-confinement identitaire et linguistique sur la structuration sociale (Heller & Boutet 2007) et écolinguistique (Calvet 1999) du parler tunisien aujourd’hui dans un paysage sociolinguistique en mutation.

La pénétration des variétés régionales dans le parler urbain s’est effectuée sous l’influence de l’exode rural générant une hétérogénéité des pratiques langagières à caractère dynamique et instable ainsi qu’une intrication des pratiques langagières inter=régionales. Les mouvements et les brassages linguistiques internes et externes qui s’opèrent dans la ville de Tunis et ses périphéries, dynamisés en termes d’âge par l’exode participeraient à une émergence discursive redistribuant les variantes linguistiques régionales apportées par ce processus en variantes sociales. Cette re-distribution se verrait comme facteur de ségrégation et de discrimination linguistiques (Bulot 2013), susceptible de reconfigurer l’identité linguistique urbaine car supplantant la variété citadine (de la ville intramuros), considérée autrefois comme un parler générateur de pouvoir et qui se présente aujourd’hui comme une ‘’espèce menacée’’ pour ses locuteurs légitimes. Seront ainsi identifiés les phénomènes les plus saillants pour être mesurables de ‘’contagion’’, d’hybridation linguistique, de mises en scènes discursives et les marqueurs attestant soit d’un continuum linguistique et social, soit de modèles multidimensionnels de la variation en action, voire d’une dissolution des parlers régionaux transmis, entraînés par les circulations migratoires internes et celui de l’espace d’accueil ; la ville où se négocient dans un marché linguistique (Bourdieu 1977) urbain les comportements langagiers.

Références
Bulot, T. (dir.) 2001. Sociolinguistique urbaine, Variations linguistiques : images urbaines et sociales.
Cahiers de sociolinguistique 6.
Bulot, T. 2013/2. Discrimination sociolinguistique et pluralité des normes identitaires. Cahiers internationaux de sociolinguistique 4 : 7-27.
Calvet, L.J. 1994. Les Voix de la ville, Introduction à la sociolinguistique urbaine. Paris : Payot. Calvet, L.J. 1999. Pour une écologie des langues du monde. Paris : Plon. 304 pages.


1 Recherche basée sur une enquête de terrain pour les besoins d’une Habilitation à Diriger des Recherches en cours
Bourdieu, P. 1977. « L’économie des échanges linguistiques ». Langue française 34 : 17-34
Charaudeau, P. 2001. Langues, Discours et Identité Culturelle, revue de didactologie des langues- cultures 2001/3-4, 123 : 341-348.
Heller, M. & Boutet, J. 2007/3-4. « Enjeux sociaux de la sociolinguistique : pour une sociolinguistique critique ». Langage et société 121-122 : 305-318.


Pratique du parler bejaoui et mise en mots de la citadinité dans l’ancienne ville de Bejaia « Algérie »
Université de Béjaia

La citadinité est avant tout un produit social. Elle change de visage et de forme en passant d’un groupe à un autre, d’une communauté ethnique à une autre, d’un individu à un autre, ou d’une partie de la ville à une autre. Ainsi, dans cette communication nous allons nous intéresser à la question de la citadinité dans l’ancienne ville de Bejaia. Cette dernière se situe au nord de l’Algérie, et plus exactement dans la région de Kabylie.En analysant le discours représentationnel des résidents de l’ancienne ville de Bejaia, nous allons tenter de répondre aux questions suivantes :

– Le parler bougiote est-il vecteur de l’identité citadine des habitants de l’ancienne ville ? L’ancienne ville est-elle le territoire du citadin ? L’espace de l’ancienne ville balise-t-il l’identité du citadin ? y a-t-il ségrégation entre les citadins et non citadins dans l’espace de l’ancienne ville de Bejaia ?

Afin de répondre aux questions de notre problématique, nous avons donc fait le choix du point de vue méthodologique de faire appel aux deux outils de recueille de données à savoir le questionnaire et l’entretien. Et vue la nature de notre recherche, investir le terrain était pour nous plus qu’une nécessité. Dans le but de comprendre ce qui s’y passe à l’ancienne ville de Bejaia du point de vue linguistique, au cours de notre enquête nous avons écouté, observé et surtout beaucoup discuté avec les informateurs

En fait, notre principal objectif à travers cette étude est de voir comment les résidents de l’ancienne ville de Bejaia mettent en mots la citadinité. Nous cherchons alors à montrer si celle-ci permet une catégorisation des groupes sociaux de l’ancienne ville (distinction citadin/non citadin). En interrogeant l’imaginaire des enquêtés de l’ancienne ville, nous ambitionnons aussi de montrer si le Bejaoui (une parlure urbaine pratiquée uniquement à l’ancienne ville de Bejaia) est considéré ou non comme étant un parler citadin. Si oui, véhicule-t-il une culture citadine ?

Références bibliographiques
Chachou, I. 2012. Repenser le champ conceptuel de la sociolinguistique maghrébine à la lumière des impératifs du terrain : Le cas du concept de citadinité. Revue d’histoire de l’Université de Sherbrooke 1(4). Messaoudi, L. 2017. Parler citadin, parler urbain. Quelles différences. Langues, cultures et sociétés 3(1) : 122-136.
Nédélec, P. 2013. Réflexions sur l’urbanité et la citadinité d’une aire urbaine américaine : (dé)construire
Las Vegas. Géographie. Université Lumière – Lyon II.
Sidi Boumedine, R. 1998. La citadinité, une notion impossible ? In : collectif : La ville dans tous ses états. Alger : Casbah


Relire Louis-Jean Calvet pour mieux comprendre la minoration linguistique, dans la ville et ailleurs
Romain Colonna (Maître de conférences HDR)
Università di Corsica / UMR CNRS 6240 LISA

L’œuvre de Louis-Jean Calvet est suffisamment riche et diversifiée pour nous permettre d’appréhender de manière complexe et critique des questions essentielles relatives à la minoration au regard des principales thématiques abordées dans ce colloque international, notamment celles qui concernent l’urbanisation du monde en lien avec ce qu’il est devenu commun d’appeler la « mondialisation ». Du côté plus singulier de la sociolinguistique, Calvet lui-même emploie ce terme dans le titre de l’un de ses ouvrages : « Les langues quel avenir ? Les effets linguistiques de la mondialisation » (2017). Nous reviendrons tout d’abord sur cette dernière notion qui, au-delà de l’apparente simplicité et évidence qui s’en dégagent, implique pourtant une réévaluation de la minoration et du lien que les deux phénomènes entretiennent.Notre intervention se situera davantage dans l’axe 4 de l’appel à communication « Savoirs, durabilité et développement » puisqu’il s’agira d’interroger plus précisément, tel que suggéré dans l’appel, « en quoi la préservation de langues minoritaires dans la ville (langues de migration, autochtones, régionales) ou encore la diversité linguistique représente un enjeu pour le développement durable dans un monde urbanisé ».

Nous tenterons en relisant Louis-Jean Calvet, partant notamment de Linguistique et Colonialisme (1979) et allant jusqu’à son baromètre des langues du monde (2017), tout en mettant ses différents écrits en perspectives, de mieux comprendre l’évolution de la minoration, d’en redessiner certains contours et d’en reposer les enjeux dans ce contexte accru de mondialisation. Celle-ci permet-elle réellement la « préservation », la « durabilité », voire le
C’est à ces différentes questions que nous tenterons de répondre au cours de notre intervention.

Références bibliographiques
Calvet, L.-J. 1979. Linguistique et colonialisme : petit traité de glottophagie. Paris : Payot.
Calvet, L.-J. 2017 Les langues : quel avenir ? Les effets de la mondialisation. Paris : CNRS éditions [2002].
Calvet L.-J. & Calvet, A. 2017. Baromètre des langues du monde, [en ligne]. Baromètre des langues dans le monde 2017 (culture.gouv.fr)


A Fourth World linguistic situation – cities vs villages with endangered languages
Eda Derhemi (PhD)
University of Illinois at Urbana-Champaign

I will first discuss, from a linguistic ecology perspective, data on dying languages in today’s world, and the launching of UNESCO’s Decade of the Indigenous Languages (IDIL22) 2022-2032. There is a vast overlap among indigenous and endangered languages. The knowledge systems of indigenous and minority groups are crucial not just to the survival of linguistic diversity, but also to the survival of our planet in current natural conditions. The complex relation between linguistic endangerment and environmental changes are one of the main interdisciplinary developments in the sub-field of linguistic endangerment studies, as reflected in, for example, Romaine and Gorenflo (2020), and Romaine (2013). I will use the concept of Fourth World linguistic endangerment as defined by Drapeau (2021) in a new conceptualization of the isolated villages and endangered language communities in Europe.In the second part of my presentation, I will examine the state of linguistic endangerment in a few centers in Italy and Greece, focusing on the differences in language maintenance in cities vs. small, isolated towns. Several factors pertaining to urbanization and mobility that are the basis of such differences will be discussed in detail. The state of Arvanitika in Athens will be compared with that in Thiva and Zeriki (Elikonas) in the region of Biotia; and that of Arbëresh in Palermo will be compared with the linguistic situation in Piana degli Albanesi. Fieldwork observations and interviews with speakers will be analyzed showing that “+/_ urban” is a feature with a high functional load in the study of linguistic endangerment. Holistic research with an ecological component which takes into account the radical differences between these areas, is indeed an important contribution that the sociolinguistic investigation can give to language maintenance.


Migrations internationales : Les usages linguistiques et les représentations langagières des Algériens du Québec (cas de la ville de Montréal)
Kahina Djerroud
Université d’Alger 2

À travers notre participation au colloque qui se tiendra à l’université de Chypre autour des langues, de l’urbanisation et des mobilités, nous souhaiterions inscrire notre problématique de recherche dans l’axe de la production langagière de l’espace.En effet, une bonne partie des travaux que nous avons menés jusqu’à présent ciblait la compréhension des rapports entre les groupes sociaux à travers la description, dans les discours, des espaces de la ville à l’aune des représentations langagières (Calvet 1999).

Nous nous intéressons, aujourd’hui, à la diaspora algérienne établie au Canada (Québec), principalement à Montréal. Une étude, théoriquement inscrite en sociolinguistique urbaine, pourra, suite à une enquête de terrain mais aussi grâce à une analyse des discours des enquêtés, nous renseigner sur les identités appropriées et revendiquées et celle qui sont réfutées (Bulot 2010) par le biais des représentations des espaces de la ville et des groupes sociaux qui l’occupent. Nous tenterons, par conséquent de répondre à la problématique principale suivante :

À travers quels discours, les Algériens établis à Montréal, décrivent-ils les espaces et les langues pratiquées dans et sur la ville ?

Nous réaliserons, dans une démarche qui se veut qualitative (Blanchet 2000), une enquête sociolinguistique par le biais de questionnaires combinés à des entretiens semi-dirigés auprès d’un échantillon d’informateurs qui sera composé d’Algériens établis à Montréal. Nous déterminerons les paramètres par lesquels le choix des enquêtés s’effectuera et nous préciserons les conditions de mobilité de cette population.

Un intérêt particulier sera accordé à la notion de la « mobilité » (Van De Avenne 2005) qui est loin d’être purement géographique puisque migrer entraine des chamboulements sociaux importants. En effet, la mobilité engage un processus, d’appropriation et de catégorisation, décelable dans le discours sur les pratiques langagières, prises d’ailleurs, comme repères afin d’évaluer le sentiment d’appartenance des locuteurs à un espace donné, valorisant ainsi tel groupe social et/ou stigmatisant tel autre.

Ce qui est intéressant dans la ville de Montréal, c’est la politique du Québec qui favorise la mobilité vers les villes de sa province. Il serait profitable de savoir si une concordance existe entre ce que les politiques de la ville encouragent et le sentiment d’appartenance notamment linguistique que la communauté d’origine algérienne ressent et témoigne à travers ses discours.


Paysages graphiques urbains dans les Antilles : pratiques, fonctions et représentations des locuteurs
Ksenija Djordjevic Leonard
Université Paul-Valéry Montpellier 3
Junior Fils Réné
Université d’État d’Haïti – EA 739 DIPRALANG

Notre contribution propose de rendre compte des rapports de pouvoir entre les langues dans des espaces plurilingues urbains des Antilles, observés à travers l’affichage public. Dans un premier temps, nous proposerons une modélisation des pratiques observées et des fonctions du paysage linguistique (Landry & Bourhis 1997) en Guadeloupe, en Martinique et en Haïti, à l’aide d’un corpus composé de clichés photographiques collectés entre 2019 et 2022, avec une attention particulière à la présence du créole guadeloupéen, martiniquais et haïtien, aux côtés du français et – parfois – de l’anglais ou de l’espagnol. Dans un deuxième temps, nous analyserons les éléments de discours collectés dans le cadre d’une enquête par questionnaires réalisée en 2022. Notre enquête a permis d’interroger 115 locuteurs créolophones des Caraïbes sur leur perception du paysage linguistique de leurs villes respectives. Nous les avons questionnés en particulier sur la visibilité du créole dans l’espace public, la fonction de l’affichage en créole, son utilité, les formes utilisées, mais aussi sur son avenir en termes de vitalité et de pratique de la langue au quotidien et dans l’espace public.Nous souhaitons mettre ici l’accent sur les acquis méthodologiques des études sur les paysages linguistiques s’insérant dans une approche écologique (Calvet 1999) des espaces plurilingues urbains, qui sont autant de ressources précieuses pour la sociolinguistique du 21ème siècle en termes de compréhension de la territorialisation de l’espace mais aussi des inégalités géopolitiques et sociales qui se lisent – entre autres champs indiciels – à travers les langues.

Références bibliographiques
Calvet, L.-J. 1999. Pour une écologie des langues du monde. Paris : Plon. Chaudenson, R. 1995. Les créoles. Paris : PUF.
Djordjevic Léonard, K. (à paraître). Paysages linguistiques créoles. In : E. Yasri-Labrique ; Scetti, F. et Djordjevic Léonard, K. (dir.) Paysages linguistiques urbains : reflets fidèles ou images déformées de la diversité sociolinguistique ? Diversité urbaine, numéro spécial, Montréal.
Govain, R. (dir.), 2021. Langues créoles : description, analyse, didactisation et automatisation. Montpellier : PULM.
Landry, R. & Bourhis, R. Y., 1997. Linguistic landscape and ethnolinguistic vitality. An empirical study ». Journal of Language and Social Psychology 16(1): 23-49.


The urban and rural space in Cyprus: Perceptions of linguistic practices
Constantina Fotiou
University of Cyprus

The proposed abstract falls under the Linguistic Space Production theme of this conference. In Greek-speaking Cyprus, there is a widespread belief that people who live in rural communities speak more ‘horkatika’ (village-tainted speech) than people living in urban communities (Fotiou & Ayiomamitou 2021; Yiakoumetti et al. 2005). What this really means is that (it is believed that) they speak a more basilect form of Cypriot Greek (henceforth CG)— the latter is the mother tongue of Greek Cypriots. To our knowledge, there are only two studies with language production data that give credence to this belief (Ayiomamitou 2018; Yiakoumetti et al. 2005) since the majority of sociolinguistic studies in this setting focus on urban sites and even when they do focus on rural settings a comparative component with what goes on in urban spaces is more often than not missing.This paper aims to examine how perceptions of ways of speaking and reported linguistic practices construct the urban and rural space on the island of Cyprus. Data come from the ‘language attitudes’ part of sociolinguistic interviews conducted with thirty Greek Cypriots aged 20–73 of both sexes living in urban areas of the district of Nicosia. Given that CG is undergoing levelling of marked basilect features and subvarieties and that a Cypriot Koine is developing (Fotiou & Grohmann 2022; Karyolemou 2008)—which, while initially solely an urban variety, is now spreading towards rural areas (Karyolemou 2008)—the interesting question here is: are there still marked differences between urban and rural spaces in Cyprus in terms of linguistic production and how are perceptions of the differences between these two kinds of spaces have changed—if at all—in the metalinguistic discourse of Greek Cypriots? This paper aims to answer the second part of this question and argue that it is high time that studies examining both the production and perception of linguistic practices in both the urban and rural spaces in Cyprus are conducted.

References
Ayiomamitou, I. 2018. Capitalising on linguistic diversity via a bidialectal intervention programme to improve linguistic performance and sociolinguistic awareness in two proximal varieties. Oxford Brookes University.
Fotiou, C., & Ayiomamitou, I. 2021. “We are in Cyprus, we have to use our language, don’t we?” Pupils’ and their parents’ attitudes towards two proximal linguistic varieties. Linguistics and Education 63. 100931. https://doi.org/10.1016/j.linged.2021.100931
Fotiou, C., & Grohmann, K. K. 2022. A small island with big differences? Folk perceptions in the context of dialect levelling and koineization. Frontiers in Communication 6. https://doi.org/10.3389/fcomm.2021.770088
Karyolemou, M. 2008. Τι απέγινε η κυπριακή διάλεκτος; Δημογραφία και γλωσσική επαφή στην Κύπρο του 21ου αιώνα [What happened to the Cypriot Greek dialect? Demographics and language contact in the 21st century Cyprus]. Επετηρίδα Κέντρου Επιστημονικών Ερευνών XXXIV: 451–492.
Yiakoumetti, A.; Evans, M. & Esch, E. 2005. Language awareness in a bidialectal setting: The oral performance and language attitudes of urban and rural students in Cyprus. Language Awareness 14(4): 254–260. https://doi.org/10.1080/09658410508668840


Parler urbain post-révolte à Beyrouth : Slogans et redéfinition identitaire
Raghda Haidar
Université libanaise

La crise socio-économique au Liban a donné lieu à une nouvelle production langagière de l’espace.Les rassemblements qui ont eu lieu à partir du 17 octobre 2019 dans plusieurs villes du pays ont vu naître des slogans, des affiches et des chansons qui exprimaient non seulement une révolte à l’ordre établi mais aussi une ébauche d’une redéfinition de l’identité libanaise, laquelle se trouve à la base de la crise qui sévit depuis des années.

Interroger les slogans, c’est interroger les caractéristiques rythmiques et linguistiques des participants (Calvet 2012).

En étudiant les slogans pendant la révolution égyptienne en 2011, L. J. Calvet définit le slogan comme une forme brève, orale que l’on peut scander en marchant (Calvet 2012). En partant de cette définition, cette recherche étudie les caractéristiques syntaxiques, phoniques et rythmiques des slogans scandés dans la capitale libanaise. Elle essaie de répondre à la question sur le rapport de cette production révolutionnaire aussi bien avec la tradition orale qu’avec la dimension identitaire.

Le corpus recueilli suite à une observation participante du terrain pendant plusieurs mois montre cette forme d’expression urbaine révélatrice de la diglossie arabe et de l’alternance des deux variétés.


Le paysage linguistique à Strasbourg
Fanny Heniqui
Université de Strasbourg

Le but de cette contribution est de rendre compte de la présence de l’alsacien à Strasbourg aujourd’hui, sous ses formes écrite et orale, et de ce qu’elle traduit aux plans sociologique et politique.Au cours de l’histoire, la langue alsacienne est passée de langue majoritaire à langue minoritaire, en raison du contexte historique, politique et social et des politiques linguistiques mises en œuvre. Ce phénomène d’affaiblissement de la langue est encore plus prégnant dans les villes, et en particulier à Strasbourg. Cependant, de nombreuses initiatives visant à affirmer l’identité et la culture alsacienne sont prises à Strasbourg, et cela passe en particulier par la diffusion de la langue locale. Nous établirons les différentes façons dont la langue s’inscrit aujourd’hui dans la ville, tant à l’écrit qu’à l’oral, et nous ferons apparaître les enjeux liés à la volonté de préserver ce patrimoine linguistique.

Références bibliographiques
Huck, H. 2015. Une histoire des langues de l’Alsace. Strasbourg : la Nuée Bleue. Les cahiers du GEPE (www.cahiersdugepe.fr)


La chanson, reflet des identités linguistiques de la ville ?
Jean-Marie Jacono
Aix-Marseille Université(AMU)

La ville est depuis longtemps une source de musique. Dès 1530, Les Cris de Paris de Clément Janequin, puis The Cries of London d’Orlando Gibbons (vers 1610), recréent l’atmosphère des marchés pour des ensembles vocaux. Mais la ville, lieu d’expression de différences et de hiérarchies, est bien sûr liée aux populations et aux langues qui s’y expriment. Et c’est dans les temporalités, les rythmes, et les mélodies des chansons populaires que ces expressions trouvent leur meilleure place. L’invention lexicale, les accents, et la déclamation constituent un champ d’étude majeur de la sociolinguistique urbaine. Louis- Jean Calvet a montré leur intérêt dans le cas du rap (1994).La ville est un espace multiple de conflits. Les villes occidentales sont soumises à un processus de gentrification qui renvoie les couches populaires à leur périphérie. La chanson et le rap peuvent incarner des identités et représenter des formes de résistance à ce processus. Ces expressions musicales sont cependant dépendantes de la mondialisation culturelle, qui combine des dimensions globales avec des dimensions locales. Si la musique ne peut être séparée des paroles dans la chanson, comme l’a montré également Calvet (1981), elle évolue sans cesse. Dès les années 1960, la recherche d’un son particulier dans l’enregistrement est une composante majeure du succès d’un titre. Cet aspect est toujours essentiel dans la représentation des identités, comme le montrent les succès du rap et du reggae. La transformation de la voix chantée en studio y est fondamentale.

La chanson et le rap sont soumis également aux lois du marché et, aujourd’hui, à leur présence sur les plateformes et les réseaux sociaux. Elles ne sont plus faites pour être écoutées mais pour être vues : le clip est devenu central pour un groupe ou un(e) interprète. L’image est souvent associée à la recherche du spectaculaire. Le clip génère même de nouvelles formes de chanson, fondées sur des rythmes dynamiques, des textes brefs, et des réalités sonores qui l’emportent sur les dimensions musicales habituelles. Ces formes « hybrides » et mouvantes dessinent un nouveau type de chanson au XXIe siècle. Elles renouvellent les représentations des identités. Le rappeur/chanteur Jul, qui a un immense succès en France, en est le meilleur représentant.

En bref, que représentent les dimensions musicales de la chanson et du rap aujourd’hui dans le cadre de la sociolinguistique ? Doit-on repenser les études en tenant compte de leur rôle dans la fabrication des identités ? Marseille et ses musiques seront la référence de ce travail.

Références bibliographiques
Calvet, L.-J. 1981. Chanson et société. Paris : Payot.
Calvet, L.-J. 1994. Les voix de la ville. Introduction à la sociolinguistique urbaine. Paris : Payot.
Carinos, E. & Hammou, K. (dir.). 2020. Perspectives esthétiques sur les musiques hip-hop. Aix-en-Provence : PUP.
Langage et Société 162, 2017.
Tagg, Ph. 2012. Music’s Meanings: a modern musicology for non-musos. New York & Huddersfield: Mass Media
Music Scholar’s Press.


The impact of language ideologies on Family Language Policy
Andri Kanikli
UCLan Cyprus
This paper discusses how language ideologies affect FLP (Family Language Policy) (Spolsky 2004) in multilingual families. It presents data that were collected in the framework of the Erasmus+ project “Planting languages-Seeds of Success”.
The data reveal that some parents choose to expose their children only to the dominant language or to
more ‘useful’ languages, as they think this is “good parenting”.Another factor that was found to negatively affect home language transmission was parents’ negative attitude towards multilingualism. There are a lot of damaging myths about multilingual acquisition, such as that it confuses children, it may cause identity problems or even language impairment. The data demonstrate that these myths undermine home language transmission.

In a globalized world, where many families have more than one language in their language repertoire, language ideologies, which appear to impede home language transmission, threaten plurilingualism and determine the linguistic landscape in urban centres (cf. Wong Fillmore 2000). Gaining an insight into what affects home language transmission or loss, enables us to effectively support multilingual upbringing and home language maintenance.

References
Spolsky, B. 2004. Language policy. Cambridge: Cambridge University Press.
Wong Fillmore, L. 2000. Loss of family languages: Should educators be concerned? Theory into Practice
39(4):203–210.


Écologie des langues minoritaires : variété d’arabe de Chypre et arménien de l’ouest
Marilena Karyolemou
Université de Chypre

L’inégalité des langues en ce qui concerne leur statut de jure ou de facto, leurs pratiques d’utilisation, leur aire de distribution, leurs domaines d’usage, le nombre des locuteurs, leur valeur marchande ou symbolique etc. (Calvet & Calvet 2017), n’épargne pas même des langues qui sont habituellement admises comme faisant partie du même groupe, telles les langues minoritaires ou en danger (désormais LMD). Ainsi, il y a des langues minoritaires ou en danger qui le sont moins et d’autres qui le sont plus.Pour être en mesure de comprendre pourquoi certaines langues sont plus en danger que d’autres, il est nécessaire de considérer l’écologie des langues, autrement dit : « … les rapports entre les langues et leur milieu, c’est-à-dire d’abord les rapports entre les langues elles-mêmes, puis entre ces langues et la société » (Calvet 1999 : 17). Dans cette présentation, on étudiera l’écologie de deux langues minoritaires de Chypre, la variété arabe parlé par la communauté maronite, appelée aussi Sanna, (Borg 1985, 2004; Roth 1979, 1986; Gülle 2014, Karyolemou 2018, 2019) et l’arménien de l’ouest parlé par la communauté arménienne (Baider & Karyolemou 2015). Les deux langues sont considérées comme des langues historiques de l’île, étant donné qu’elles y sont parlées depuis le 7e-8e siècle sans interruption.

Si l’on veut déterminer le degré de danger qu’encourt chacune de ces deux langues, on obtient des résultats à peu près similaires tant qu’on considère les conditions écolinguistiques locales. Les choses sont tout à fait différentes, si l’on considère des ordres écologiques supérieurs, régionale ou globale. Ici, il s’avère que la fonction de langue de réseau, qu’elle soit une fonction réelle ou imaginaire, et le facteur de mobilité jouent un rôle important dans la vitalité d’une LMD et peuvent nous aider à comprendre des différences que l’on observe entre ces deux langues sur le plan local et qui ne pourraient être expliquées par des considérations écologiques locales uniquement.

Références bibliographiques
Baider, F. & Karyolemou, M. 2015. Linguistic Unheimlichkeit: Τhe Armenian and Arab communities of Cyprus. In: U. Jessner & Cl. Kramsch (dir.) Multilingualism: The challenges. Trends in Applied Linguistics. Berlin: Mouton de Gruyter. 185-209.
Borg, A. 1985. Cypriot Arabic: a historical and comparative investigation into the phonology and morphology of the Arabic vernacular spoken by the Maronites of Kormakiti village in the Kyrenia district of north- western Cyprus. Stuttgart: Komissionsverlag Steiner Wiesbaden.
Borg, A. 2004. A Comparative Glossary of Cypriot Maronite Arabic (Arabic-English) with an introductory essay. Leiden/Boston: Brill.
Calvet, L.-J. 1999. Pour une écologie des langues du monde. Paris : Plon.
Calvet, A. & Calvet, L.-J. 2017. Baromètre des langues dans le monde. Baromètre des langues dans le monde 2017 (culture.gouv.fr)
Karyolemou, M. 2018. Language revitalization, land and identity in an enclaved Arab community in Cyprus. In: S. Drude, N. Ostler & M. Moser (dir.) Language Documentation and Description. Proceedings of the 22nd Annual Conference of the Foundation for Endangered Languages (FEL XXII, 2018). Londres: EL Publishing. 14-18.
Karyolemou, M. 2019. A story at the periphery: Documenting, standardising and reviving Cypriot Arabic. International Journal of the Sociology of Language 260: 1-14.
Roth, A. 1979. Le verbe dans le parler arabe de Kormakiti (Chypre). Études chamito-sémitiques G.L.E.C.S, supplément 6.
Roth, A. 1986. Langue dominée, langue dominante : à propos de deux scénarios d’extinction ou d’expansion de l’arabe. Hérodote 42: 65-74.


Des « Villes invisibles » aux « Communautés invisibles » dans la praxis des ateliers thématiques en langues amérindiennes : modélisation des niches écologiques urbaines et des circulations migratoires autochtones au Mexique
Jean Léo LEONARD
Université Paul-Valéry Montpellier 3, Dipralang : EA 739
La méthodologie des TERPLO1 est une praxis inspirée de la pédagogie critique de Paulo Freire, en partenariat avec des communautés de pratique (Wenger 1998) d’instituteurs et d’élèves ou d’étudiants bilingues et interculturels en domaine amérindien. Cette méthode travaille collectivement, dans une démarche ascendante (bottom-up), l’élaboration de formes et de contenus pédagogiques endogènes, du double point de vue freirien de la codification (pratiques diamésiques en langues minorées, scénarisation de récits épistémiques socialement ancrés) et de la réduction (saisie critique du réel à partir de dilemmes)
v. Léonard & Avilés Gonzalez (2019). Elle fonde l’analyse des contenus des textes produits durant ces ateliers d’écriture en langues indigènes sur la sémiotique narrative et visuelle (Hénault 2019), afin de proposer aussi bien des applications pédagogiques pour les écoles, collèges et universités bi- plurilingues au Mexique que pour des diagnostics socio-environnementaux auprès des syndicats, des coopératives et des ONG autochtones.L’activité qui sera décrite ici est inspirée de l’idée d’Howard Becker (2007) qu’une manière efficace et heuristique de modéliser des dilemmes sociaux, notamment en urbanistique, consiste à adopter la démarche d’Italo Calvino dans son ouvrage de fiction Les villes invisibles (1972), qui prend comme motifs générateurs, sur le plan sémiotique, des concepts-pivots comme mémoire, désir, signes, échanges (interactions et transactions), regard/vision, morts, etc. qui correspondent, en termes de topologies à la Peter Sloterdijk (Sphères III) à autant d’aléthotopes, érotopes, anxiotopes, thanatotopes, etc. (Meziou 2019). Ces topoi sont modélisés par les locuteurs à travers des discours en langues autochtones décrivant la situation des villes amérindiennes du Mexique, comme San Felipe Jalapa de Diaz (Oaxaca, 25 500 habitants) en zone mazatèque, ou la zone otomi de Pantepec, Puebla (18 100 hbts), à travers des productions textuelles opposant utopie et dystopie autour de dilemmes (v. http://axe7.labex-efl.org/node/280 et http://axe7.labex-efl.org/node/390, respectivement) : défis écologiques, mouvements migratoires, richesse et inégalités, violence et insécurité, assimilation et acculturation linguistiques.

La relation entre langue(s) et urbanisation est ainsi représentée de manière endogène, à travers les langues autochtones, en travaillant leur corpus (lexique et grammaire) à des fins à la fois didactiques, réflexives, par autant de « scènes de la glottophagie ordinaire », rendues d’autant plus puissantes, sur le plan expressif, que ces représentations (socio)ethnolinguistiques du fait urbain ont pour vecteur la langue en position « basse » des sujets parlants, engagés dans un processus réflexif et résilient face à la diglossie. Cette praxis critique des « communautés invisibles » fait également écho à la critique de la notion de communauté linguistique chez Calvet, au profit de celle de communauté sociale (1994 : 79-129), particulièrement adapté à la sociolinguistique urbaine.

Références bibliographiques
Becker, H. 2007. Telling About Society. Chicago: University of Chicago Press.
Calvet, L.-J. 1994. Les voix de la ville. Introduction à la sociolinguistique urbaine. Paris : Payot. Calvino, I. 1972. Le città invisibili. Milan : Mondadori.
Hénault, A. (dir.) 2019. Le sens, le sensible, le réel. Essai de sémiotique appliquée. Paris : Sorbonne Université Presses.
Léonard, J.-L. & Avilés Gonzalez, K. 2019. Didactique des “langues en danger ». Recherche-action en dialectologie sociale. Paris : Michel Houdiard éditeur.
Meziou Olfa, R. 2019. Ingénierie, climatologie et topographie de l’être-dans-le-monde – Des îles pour penser l’architecture ? Geographica Helvetica 74 : 71-79 [https://doi.org/10.5194/gh-74-71-2019].
Wenger, E. 1998. Communities of practice: learning, meaning, and identity. Cambridge, Mass.: Cambridge University Press.


Taller de elaboración de recursos pedagógicos en lenguas originarias, en français Ateliers Thématiques d’Elaboration de Ressources didactiques pour Langues Autochtones, ou ATERPLA v. http://axe7.labex-efl.org/taxonomy/term/12.


Οι αναπαραστάσεις του/της ‘ανεκτού/ής Άλλου/ης’ ως πολιτική διαχείρισης της ‘ετερότητας’: από την υποστήριξη στην αποκήρυξη
Maria Lymperi
Université de Patras
Argyris Archakis
Université de Patras
Η ανακοίνωσή μας περιστρέφεται γύρω από το εξής ερώτημα: κατά πόσο κείμενα που υποστηρίζουν ρητά τους/τις μετανάστες/τριες και την εγκατάστασή τους στην Ελλάδα μπορεί εντέλει να αναπαράγουν ή να μετασχηματίζουν τους ρατσιστικούς λόγους και τις ρατσιστικές πολιτικές;
Το θεωρητικό μας πλαίσιο βασίζεται στην ευρύτερη συζήτηση του θεσμικού/συστημικού ρατσισμού. Ειδικότερα, αξιοποιούμε τη συσχέτιση του ρατσισμού με την πρόσληψη της κινητικότητας και της διαφορετικότητας των μεταναστών/τριών ως ‘απειλής’ (Foucault 2003), καθώς και την επιστράτευση πολιτικών φόβου και ανοχής για τη διαχείριση αυτής της ‘απειλής’ (Brown 2006). Βασικό αντικείμενο της ανάλυσής μας θα αποτελέσουν οι αναπαραστάσεις, για τη μελέτη των οποίων αξιοποιούμε έννοιες όπως ορατότητα (visibility, Butler 1997), απόρριψη/αποβολή (abjection, Butler 1993), επαναλειψιμότητα (iterability, Butler 1997), καθώς και τη μεταγλώσσα που προτείνει ο van Leeuwen (2008).Το υλικό μας περιλαμβάνει τέσσερα μιντιακά/διαδικτυακά πολυτροπικά κείμενα, μέσω των οποίων ανθρωπιστικοί/αντιρατσιστικοί φορείς παρουσιάζουν τη δράση τους στο ευρύ κοινό και έχουν κοινή θεματολογία (φιλοξενία ασυνόδευτων μεταναστών/τριών, διδασκαλία ελληνικών). Πρόκειται για κείμενα που υποστηρίζουν ρητά τους/τις μετανάστες/τριες και προωθούν τα δικαιώματά τους, υλοποιώντας προγράμματα στήριξης της εγκατάστασής τους στην Ελλάδα.

Στην ανάλυσή μας εξετάζουμε πώς οι παραγωγοί αυτών των κειμένων επιλέγουν να αναπαραστήσουν τους/τις μετανάστες/τριες και τις σχέσεις τους με τις εθνικές/πλειονοτικές ομάδες. Ιδιαίτερη έμφαση δίνουμε στα εξής ερωτήματα:
-Πώς επιτυγχάνεται η μετατόπιση του ρατσιστικού βλέμματος από τον/την ‘μη- ανεκτό/ή Άλλο/η’ (όπως στερεοτυπικά συμβαίνει στους ρητούς ρατσιστικούς λόγους) στον/στην ‘ανεκτό/ή Άλλο/η’;
-Πώς εξακολουθεί να επιτελείται η αποκήρυξη του/της ‘μη-ανεκτού/ής Άλλου/ης’, χωρίς μάλιστα να γίνονται ρητές αναφορές σε αυτόν/ή, με αποτέλεσμα η αποκήρυξη να μένει απαρατήρητη;
Το βασικό συμπέρασμα στο οποίο καταλήγουμε είναι ότι τα υπό μελέτη κείμενα δεν υποστηρίζουν το σύνολο των μεταναστών/τριών, όπως προγραμματικά διατείνονται, αλλά μόνο τους/τις ‘ανεκτούς/ές Άλλους/ες’, όσους/ες δηλαδή συντονίζονται με τις προσδοκίες και τις απαιτήσεις της εθνικής πλειονότητας και δεν ‘απειλούν’.

Βιβλιογραφικές αναφορές
Brown, W. 2006. Regulating aversion: Tolerance in the age of identity and empire. Princeton, NJ and Oxford: Princeton University Press.
Butler, J. 1993. Bodies that matter: On the discursive limits of “Sex”. New York: Routledge. Butler, J. 1997. Excitable speech: A politics of the performative. New York: Routledge.
Foucault, M. 2003. “Society must be defended”: Lectures at the Collège de France 1975-76.
Μετάφραση: D. Macey. New York: Picador.van Leeuwen, T. 2008. Discourse and practice: New tools for critical discourse analysis. New York: Oxford University Press.


Le rôle de la langue et de la culture quechua
dans le processus d’urbanisation des zones andines au Pérou
Geremiss Martinez Palomino
Université Paris Cité

L’urbanisation des régions andines et ses effets ont affecté les pratiques langagières et les constructions identitaires des locuteurs- et héritiers- de la langue quechua au Pérou. Les migrations internes et un ensemble de facteurs économiques et politiques ont contribué au recul, et même à l’abandon des langues autochtones au profit de l’espagnol. Enfin, l’avènement de la globalisation et des nouvelles technologies ont pu participer à ce phénomène de shift11.Pendant des décennies, les politiques en faveur de la langue quechua ont suivi les idéologies prédominantes qui l’ont circonscrit à la ruralité et au temps passé (Zavala, Mujica, Cordova, & Ardito 2014), et l’ont confiné aux espaces familiaux et ruraux. Ainsi, ces politiques se concentrent sur des régions rurales, et leur méthodologie correspond aux besoins des locuteurs en zone rurale. Pourtant, le dernier recensement montre que le quechua est en pleine transformation car actuellement il est plus urbain que rural, et ceci tout particulièrement dans le département d’Ayacucho2. De même, des dernières études montrent que la réappropriation du quechua était amorcée parmi les jeunes générations à travers notamment la musique et les plateformes digitales. Virginia Zavala a étudié un mouvement de jeunes artistes comme Liberato Kani ou Renata Flores3 qui se réapproprient du quechua en utilisant la langue et en fusionnant des rythmes andins avec le rap et le trap (Zavala 2020). De même, Solischa et Urpi Camacho sont connues dans des plateformes digitales comme Youtube, Facebook ou TikTok pour enseigner le quechua, montrer leur quotidien dans les Andes et d’autres activités très diverses, toujours en utilisant le quechua et en revendiquant leur identité andine.

Ces initiatives juvéniles ravivent le débat scientifique concernant la place du quechua dans un monde de plus en plus urbanise et interconnecte, et ce débat vient bousculer les oppositions courantes entre tradition versus modernité, local versus global, rural versus urbain, indigène versus non indigène, etc.4. Ces actions permettent également de remettre en question les actions de revitalisation purement « rurales » et de « repolitiser » (Zavala 2020) les questions des langues autochtones

Ma proposition vise à souligner des indices de la dynamique du quechua dans ces nouveaux contextes d’urbanisation et de globalisation. Pour ce faire, je présenterai d’une part le contexte sociohistorique qui a influencé les politiques linguistiques du pays depuis son indépendance, et d’autre part, l’interrelation entre les pratiques langagières du quechua et les diverses formes de socialisation des jeunes en ville. Ce dernier point sera étayé par des études sociolinguistiques, notamment les travaux de Virginia Zavala et Amy Firestone, ainsi que des propres données d’une pré-enquête réalisée dans le cadre de la formulation d’un projet doctoral, portant sur le rôle des pratiques langagières et des idéologies linguistiques juvéniles dans l’avenir de la langue quechua en zone urbaine à Huanta, Ayacucho, Pérou. Ce projet sera mené en collaboration avec des jeunes entre 13 et 21 ans faisant partie de la Mesa de Concertacion de Jovenes de Huanta, un organisme municipal. À travers une approche participative qui les invite à co-construire un projet audiovisuel, mon étude vise à développer chez les jeunes participants des interrogations sur la langue et culture quechua ainsi que sur leur rôle en tant qu’« héritiers », tout en faisant partie de la construction de cette recherche.

Je souhaite ainsi proposer quelques pistes pour explorer la manière dont les jeunes citadins, locuteurs du quechua, « construisent une version différente de la quechuidad ».

Bibliographie
1. Fishman, 1991.
2. Au Pérou, le quechua est présent 62.3% dans des zones urbaines et 37.5% en zones rurales à national. En Ayacucho, ce chiffre s’élève à 69.45%
(REDATAM, 2017).
3. Renata Flores est devenue célèbre en Amérique du Sud grâce à une reprise en quechua de la chanson « The way you make me feel » de Michael Jackson en 2015. Après plusieurs reprises en quechua de chansons célèbres, Renata a commencé à créer sa propre musique en fusionnant des rythmes andins avec le trap. Dans ses compositions musicales elle revendique l’identité quechua, la liberté et empowerment féminin, raisons pour lesquelles elle est parmi les 100 femmes les plus influentes selon le magazine Hola ! (EFE, 2021)
4. Zavala & Branez 2017.


La ville comme opportunité :
Littératies urbaines d’un collectif d’écrivain.e.s migrant.e.s à Paris
Carola Mick
Université de Paris-Cité, laboratoire Ceped (Centre-Population et Développement)
Iván Blas Hervias
Université de Paris-Cité, laboratoire Ceped (Centre-Population et Développement)

Comme haut lieu de la culture et de la littérature, la ville de Paris exerce une attraction toujours vivante envers les artistes. Si la perspective de reconnaissance sur le marché de la culture local ou au sein de l’espace francophone est réservée à très peu d’entre eux (voir Harchi 2016), « Paris » s’est inscrit de manière mythique dans la littérature globale, et notamment latinoaméricaine. Comme « capitale littéraire de l’Amérique latine » (Villegas 2007), la ville de Paris est devenue un lieu de passage presque incontournable pour toute personne à la sensibilité ou vocation artistique.C’est ainsi que depuis une dizaine d’année, Iván Blas Hervias, capitaine et écrivain ayant jeté ancre à Paris, réussit à rassembler un collectif de personnes multilingues majoritairement hispanophones « sudaméricains », pour les événements de la « Carpa literaria ». Il s’agit d’un espace ambulant et improvisé d’échange et performance littéraire, où la grande littérature hégémonique et de multiples formes de littératies urbaines se croisent.

Sur base de nos échanges autour de ces événements et via la littérature, cette proposition de communication cherche à analyser comment la « Carpa literaria » en tant que métaphore (Ricœur 1975) transforme la ville : Elle la réactualise dans de multiples facettes, à la fois comme promesse et frustration des projets de libération et d’émancipation politique et économique ; elle véhicule les sentiments d’insécurité de certain.e.s et de refuge pour d’autres, elle réconcilie la mobilité et la sédentarité, le local el le global, le « Nord » et le « Sud » global (voir Bauman 1998). En choisissant la littérature comme point de rencontre, domaine aux exigences particulièrement normatives, elle transforme la ville en une opportunité de rencontre, d’échange transculturel, de transformation du paysage socioculturel, géographique et social urbain à l’intérieur d’un monde global.

Dans cet exposé, nous allons caractériser les pratiques langagières et littératies (Gee 1999) qui émergent de cet espace urbain particulier, et les interprétons comme une forme d’agentivité spatiale (Mick 2013) qui transforme les rapports sociaux à l’espace. Nous introduisons des réflexions théoriques au sujet du pouvoir performatif de la métaphore (Quijano 1964) ainsi que des réflexions méthodologiques par rapport à la collaboration dans un espace urbain, entre l’académie et d’autres acteurs sociaux.

Références bibliographiques
Gee, J. P. 1999. The new literacy studies and the « Social Turn ». Harvard University Press. 17955246088 NLS Social Turn.doc. https://files.eric.ed.gov/fulltext/ED442118.pdf
Mick, C. 2013. Agencia espacial en un espacio instituciona. In T. Yurén & C. Mick (éds.), Educacion y agencia. Aproximaciones teoricas y analisis de dispositivos. Juan Pablos. 127-152
Quijano, A. 1964. La poesía : Una praxis. Haraui 1(2) : 11-12.
Ricœur, P. 1975. La métaphore vive. Paris : Seuil.
Villegas, J.-C. 2007. Paris, capitale littéraire de l’Amérique latine. Dijon : Éditions universitaires de Dijon.


The presence of the Italian Language in the urban LL of the Cypriot cities and in the educational context as a tool to enhance language awareness
Polina Papoui
Università per Stranieri di Siena

Linguistic Landscape (LL) can be defined as the study of signs and messages in written form visible in the public space (Gorter 2006). LL is a branch of sociolinguistics emerged in the context of studies on multilingualism and language policies, on minority languages and heritage languages (HL), an approach capable of providing a unique perspective on the coexistence, competition and interaction of different ethnolinguistic communities. In addition to having an information function, LL also appears to be able to condition our being, our individual and group identity, uses, choices and language attitudes.According to Habermas (2009), the urban Linguistic Landscape is transformed into a multipurpose space, an “arena”, where languages and cultures prevail in relation to others.

Cities become “showcases” of different cultures and civilizations, carriers of new identities embodied under the concepts of multilingualism and multiculturalism, where the contact between languages takes place; tangible elements that interact and are observed (Goffman 1963; Lefebvre 1991) in the urban space.

Mondada (2000) refers to the cities as texts, Calvet (1994) underlines that city texts are relatively cryptic and inaccessible to everyone and in addition, cities can become multimodal texts that can serve in education by developing literacy practices, enhancing language awareness, promoting social justice and bringing forward ethical concerns about inequality, oppression and compassion (Freire 1970; Bourdieu 1977; Apple 1979 inter alia).

The present study aims to examine how the Italian language figures in the Linguistic make up of Cyprus and more particularly how it interacts with the other languages that exist in the area. In addition, our aim is to examine the language contact existing with the Greek language and other HL that are present. This contribution aims to reflect in particular on how the visibility of HL can positively influence the attitudes of learners towards the languages themselves and, consequently, how this can stimulate learning in a perspective of lifelong learning.

This study is part of an ongoing doctoral thesis at the University for Foreigners of Siena on the presence of the Italian language in the contemporary LL of the Oriental Mediterranean, more specifically in Cyprus. The actual research focuses on two axes: on one hand the urban linguistic landscape and more specifically the main streets of the Cypriot cities (Nicosia, Limassol, Larnaca and Paphos but also Ayia Napa and Troodos) where the Italian language is visible. On the other hand, the educational context (schoolscape) in 8 Lyceums of Cyprus (public and private), where the Italian language is taught as HL and a private school in Limassol specially chosen due to its international and intercultural character (over 50 different plethora of students with different HL). Photographic material (300 photos, questionnaires (students and Italian teachers) and interviews (with students and teachers) were given and will be analysed.

References
Landry, R. & Bourhis, R.Y 1997. Linguistic landscape and ethnolinguistic vitality. Journal of Language and Social Psychology 16 (1): 23-49.
Calvet, L.-J. 1994. Les voix de la ville : Introduction à la sociolinguistique urbaine. Paris : Payot et Rivages. Gorter, D. 2006. Linguistic landscape: A new approach to multilingualism. Clevedon, Buffalo, Toronto: Multilingual Matters.
Ferrini, C. 2016. Italianismi a Manheim: la dialettica fra elementi etnici tradizionali e nuovi valori identitari. Studi Italiani di Linguistica Teorica e Applicata XLV (1): 183-202.
Hélot, C. & Young, A. 2002. Bilingualism and language education in French primary, schools: Why and how should immigrant languages be valued? International Journal of Bilingual Education and Bilingualism 5(2): 96-112.


Graffiti and multilingualism: The linguistic landscape of urban Cyprus
Natalia Pavlou
University of Cyprus
Constantina Fotiou
University of Cyprus

The relationship between the Linguistic Landscape (henceforth LL) of a place and its sociolinguistic context is reciprocal since the former both reflects the relative power and status of the languages of its sociolinguistic context and shapes it because the language in which signs are inscribed can have an effect on people’s perception of the status of the different languages of that context (Cenoz & Gorter 2006). This paper studies the language use in the written discourse of graffiti in two cities of the island of Cyprus: Lefkosia and Limassol. Since Greek-speaking Cyprus is a diglossic setting, with Cypriot Greek being the Low variety and Standard Modern Greek the High one (Rowe & Grohmann 2013, Fotiou & Ayiomamitou 2021, among others), the study of how different linguistic varieties are used in its LL can contribute to addressing major questions of multilingualism.The data presented in this project were collected in the summer of 2015 and 2022 when each of the historical centers of the Lefkosia and Lemesos was visited and instances of graffiti were photographed, documented, and categorized by language. Graffiti is usually a very spontaneous form of expression, and it belongs to the categories of private signage (Pavlenko 2010) and ‘bottom-up’ items, that is, LL items “issued by individual social actors” (Ben-Rafael et al. 2006: 14). In the two sites under investigation here there are three main languages used in the graffiti examples collected: Cypriot Greek, Standard Modern Greek, and English. It is argued in this paper that these languages have different roles to play. The notions of positivity and negativity are correspondingly found to be crucial in the use of English or Standard Modern Greek; the latter is mainly used for criticism to the government and the politics often inviting the addressee to take action for what is being discussed.

Last, Cypriot Greek seems to have a symbolic use in that the writers expressing themselves in it may just wish to mark its presence in the LL of the island. Since it is their native language its use and presence in the LL can be seen as an act of identity expression and well as the result of CG taking over some domains of use from SMG in recent years.

References
Ben-Rafael, E.; Shohamy, E.; Hasan, M.; Bar-Ilan, A. & Trumper-Hecht, M. 2006. Linguistic landscape as symbolic construction of the public space: The case of Israel. In: D. Gorter (ed.) Linguistic landscape: A new approach to multilingualism. Clevedon: Multilingual Matters. 7–30.
Cenoz, J. & Gorter, D. 2006. Linguistic landscape and minority languages. In: D. Gorter (ed.) Linguistic landscape: A new approach to multilingualism. Clevedon: Multilingual Matters. 67–80.
Fotiou, C. & Ayiomamitou, I. 2021. “We are in Cyprus, we have to use our language, don’t we?” Pupils’ and their parents’ attitudes towards two proximal linguistic varieties. Linguistics and Education 63, 100931. https://doi.org/10.1016/j.linged.2021.100931
Pavlenko, A. 2010. Linguistic landscape of Kyiv, Ukraine: A diachronic study. In: E. Shohamy et al. (eds.)
Linguistic landscape in the city. Bristol: Multilingual Matters. 133– 150.
Rowe, C. & Grohmann, K. 2013. Discrete bilectalism: Towards co-overt prestige and diglossic shift in Cyprus. International Journal of the Sociology of Language 224: 119–142.


La minorisation ethno-sociolinguistique en contexte urbain.
Le cas de la communauté kabyle d’Oran, Algérie
Maria Philippou-Ouaras
Université d’Oran 2

Cette recherche se propose d’interroger la situation de la langue kabyle, en Algérie, dans le contexte migratoire et dans celui des mobilités sociales en prenant en compte ses dimensions synchroniques et diachroniques. Elle vise surtout à interroger le poids de la migration et des mobilités sociales et leurs répercussions sur la transmission de la langue kabyle dans l’Oranie. Ce travail de recherche s’inscrit dans le cadre de la sociolinguistique urbaine, discipline qui vise, selon Erfurt (1999), à donner une description et une explication analytiques de la complexité entre la langue, l’identité et la pratique sociale.Les deux espaces qui nous intéressent principalement ici sont l’espace villageois et l’espace urbain. Qu’est-ce que les langues nous apprennent sur les structures sociales ? Comme instrument de recherche, nous avons privilégié le recours aux entretiens semi-directifs. Selon Bulot (2001), la sociolinguistique pose la question de savoir ce que la ville fait aux langues ou ce que les langues font de la ville. L’un des objectifs de cette recherche est de retracer l’évolution de ce parler kabyle à Oran, et ce sur trois ou quatre générations et d’analyser les représentations sociolinguistiques.

Cette migration a pour corollaire une mobilité linguistique. D’après Blanchet (2000), la langue est l’un des éléments premiers qui entrent dans la construction et la définition de l’identité individuelle et sociale. Chaque langue est la marque d’une identité spécifique.

Références bibliographiques
Erfurt, J. 1999. Préface. In : T. Bulot (éd.) Langue urbaine et identité (langue et urbanisation linguistique à Rouen, Venise, Berlin, Athènes et Mons). Paris : L’Harmattan. 7-14.
Blanchet, Ph. 2000. La linguistique de terrain, méthode et théorie (une approche ethno-sociolinguistique). Rennes : Presses Universitaires de Rennes. 145 pages.
Bulot, T. 2001. L’essence sociolinguistique des territoires urbains : un aménagement linguistique de la ville. Cahiers de Sociolinguistique 6 : 5-11.


Brève histoire de l’enquête urbaine. Marcel Cohen et l’enquête à Alger (1908-1909)
Josiane Boutet
Professeure émérite de Sorbonne Université

Grâce à Louis-Jean Calvet, la sociolinguistique française qui s‘institutionnalise dans le courant des années 1970 s’intéresse aux contextes urbains en tant qu’ils sont plurilingues : les marchés parisiens à Belleville, les marchés de Dakar, Bamako, Ziguinchor, Canton. On peut aussi dans cet axe du plurilinguisme mentionner les travaux de l’IDERIC et spécifiquement ceux de Gabriel Manessy et Paul Wald à Banguy. La ville a aussi été appréhendée en tant qu’espace (J.- M. Barbéris en 1997) ; comme lieu de conflits de normes sociales et linguistiques et de gentrification (T. Bulot en 2001 ; J.-M. Géa et M. Gasquet-Cyrus en 2017)La ville n’est devenue un objet scientifique en sciences sociales qu’à la fin du XIXème siècle, alors que les territoires ruraux l’avaient été des décennies auparavant (par exemple en dialectologie). J’évoquerai ainsi l’Ecole de Chicago, école de sociologie fondée en 1892, pour qui les villes constituent de véritables laboratoires d’observation des faits sociaux.

Du côté d’une histoire des idées linguistiques, je rappellerai le précédent important que constitue l’enquête urbaine du linguiste Marcel Cohen en 1908-1909 à Alger. Je présenterai en premier lieu le contexte intellectuel de cette époque : Ernest Renan, William Marçais, Antoine Meillet. Les enquêtes dialectologiques ne s’intéressaient pas aux villes mais aux espaces ruraux et à leurs locuteurs, réputés pour leurs formes linguistiques dites pures. Quant aux travaux de grammaire comparée, ils ne reposaient pas sur des enquêtes mais sur des textes (E. Renan par exemple). William Marçais transforme cet état des études dialectologiques en prenant une ville, Tlemcen, comme cadre de son enquête dialectologique (Le dialecte arabe parlé à Tlemcen : Grammaire. Textes et Glossaire, 1902). A sa suite, M. Cohen s’empare d’une autre ville algérienne, Alger, grand port pluriculturel et plurilingue où de nombreuses langues sont historiquement en contact. Je présenterai les différentes parties de son ouvrage publié en 1912 (Le parler arabe des juifs d’Alger). J’insisterai particulièrement sur les résultats qu’on peut qualifier comme étant de nature sociolinguistique ; dimension que l’arabisant David Cohen soulignait en 1985 : « [ce livre] témoigne d’une conception sociolinguistique non explicitée très proche de ce qui prévaut aujourd’hui. » M. Cohen expose un point de vue sur la ville et les contacts de langues tout à fait novateur en 1912.


Ce que la sociolinguistique urbaine doit aux Voix de la ville de Louis-Jean Calvet
Ibtissem Chachou
Université de Mostaganem
En explorateur-archéologue et géographe du savoir linguistique, Louis-Jean Calvet n’a eu de cesse depuis voilà plus d’un demi-siècle d’interroger les faits langagiers, leur évolution et leur circulation, à travers les routes du désert, les voies des mers, la vie des ports et l’espace des villes. Plaçant la planète des langues sous son regard microscopique de sociolinguiste, Calvet a multiplié les plaisirs pour satisfaire sa curiosité intellectuelle à l’égard de celle qui contient tout comme disait le poète1. Chercheur passionné et sociolinguiste prolifique, il s’est penché sur plusieurs terrains et y a considéré de nombreux phénomènes décrits et analysés au travers d’une bibliographie riche, dense et variée. L’impact de ses travaux sur la sociolinguistique francophone, pour ne nous limiter qu’à celle-ci, suffit à renseigner sur la pertinence de ses théorisations issues de l’observation longitudinale et intelligente de contextes complexes. Dans le cadre de cet hommage, je souhaite revenir sur Les voix de la ville paru en 1994 aux éditions Payot & Rivages où une introduction à la sociolinguistique urbaine est amorcée qui sera complétée par le biais d’autres ouvrages où le rapport des langues au fait urbain continuera à être questionné. L’ouvrage est fondamental dans la mesure où il a ouvert la voie à un courant de la sociolinguistique qui ne cesse de se diversifier à travers divers objets d’étude, concepts, approches et différents terrains amenant d’un point de vue épistémologique à un croisement interdisciplinaire nécessaire à une compréhension affinée de la vie, de l’évolution et de l’organisation des langues en lien avec les spécificités de l’espace urbain.

1.Hugo von Hofmannsthal (Vienne 1874-Rodaun, près de Vienne, 1929) : « La langue est tout ce qui reste à celui qui est privé de sa patrie. Mais la langue, il est vrai, contient tout. ».


La chanson, reflet des identités linguistiques de la ville ?
Jean-Marie Jacono
Aix-Marseille Université(AMU) – Laboratoire d’études en sciences des arts (LESA)

La ville est depuis longtemps une source de musique. Dès 1530, Les Cris de Paris de Clément Janequin, puis The Cries of London d’Orlando Gibbons (vers 1610), recréent l’atmosphère des marchés pour des ensembles vocaux. Mais la ville, lieu d’expression de différences et de hiérarchies, est bien sûr liée aux populations et aux langues qui s’y expriment. Et c’est dans les temporalités, les rythmes, et les mélodies des chansons populaires que ces expressions trouvent leur meilleure place. L’invention lexicale, les accents, et la déclamation constituent un champ d’étude majeur de la sociolinguistique urbaine. Louis-Jean Calvet a montré leur intérêt dans le cas du rap (1994).La ville est un espace multiple de conflits. Les villes occidentales sont soumises à un processus de gentrification qui renvoie les couches populaires à leur périphérie. La chanson et le rap peuvent incarner des identités et représenter des formes de résistance à ce processus. Ces expressions musicales sont cependant dépendantes de la mondialisation culturelle, qui combine des dimensions globales avec des dimensions locales. Si la musique ne peut être séparée des paroles dans la chanson, comme l’a montré également Calvet (1981), elle évolue sans cesse. Dès les années 1960, la recherche d’un son particulier dans l’enregistrement est une composante majeure du succès d’un titre. Cet aspect est toujours essentiel dans la représentation des identités, comme le montrent les succès du rap et du reggae. La transformation de la voix chantée en studio y est fondamentale.

La chanson et le rap sont soumis également aux lois du marché et, aujourd’hui, à leur présence sur les plateformes et les réseaux sociaux. Elles ne sont plus faites pour être écoutées mais pour être vues : le clip est devenu central pour un groupe ou un(e) interprète. L’image est souvent associée à la recherche du spectaculaire. Le clip génère même de nouvelles formes de chanson, fondées sur des rythmes dynamiques, des textes brefs, et des réalités sonores qui l’emportent sur les dimensions musicales habituelles. Ces formes « hybrides » et mouvantes dessinent un nouveau type de chanson au XXIe siècle. Elles renouvellent les représentations des identités. Le rappeur/chanteur Jul, qui a un immense succès en France, en est le meilleur représentant.

En bref, que représentent les dimensions musicales de la chanson et du rap aujourd’hui dans le cadre de la sociolinguistique ? Doit-on repenser les études en tenant compte de leur rôle dans la fabrication des identités ? Marseille et ses musiques seront la référence de ce travail.

Références bibliographiques
Calvet, L.-J. 1981. Chanson et société. Paris : Payot.
Calvet, L.-J. 1994. Les voix de la ville – introduction à la sociolinguistique urbaine. Paris : Payot. Carinos, E. ; Hammou, K. (dir.). 2020. Perspectives esthétiques sur les musiques hip-hop. Aix-en-
Provence : PUP.
Langage et Société 162, 2017.
Tagg, Ph. 2012. Music’s meanings: a modern musicology for non-musos. New York & Huddersfield:
Mass Media Music Scholar’s Press.


Lieu, espace et temps dans le lexique de la communauté des pêcheurs de Guet-Ndar
Adjaratou Oumar Sally
IFAN-CAD, Université de Dakar

L’utilisation fréquente de la langue française, langue officielle au Sénégal héritée de la colonisation, a entraîné, chez bon nombre d’acteurs de la pêche, l’oubli de beaucoup de termes wolof employés dans leurs domaines spécifiques, notamment le lexique de l’espace et du temps. À cela s’ajoutent les contacts interethniques et interlinguistiques qui ont eu des influences notoires dans le lexique spatio- temporel notamment les emprunts lexicaux et les nouveaux termes issus des technologies de l’information et de la communication. Ces influences découlent de nombreux déplacements des pêcheurs de Guet-Ndar à Saint Louis, au Nord du Sénégal vers différentes contrées du pays. Elle résulte aussi de la présence de nombreux étrangers de la sous-région dans la zone de pêche à Saint- Louis.La migration des guets-ndariens due aux facteurs climatiques, mais aussi aux facteurs sociaux économiques (surpopulation, urbanisation, modernisme…) entraine ainsi une énorme perte du lexique traditionnel lié à la pêche, à son fonctionnement et à ses différentes activités. Ces mots qui se perdent appauvrissent la langue. Or, comme le dit Evans N. dans son livre Ces mots qui meurent, les langues menacées et qu’elles ont à nous dire, « Chaque langue est une bibliothèque unique… Chacune raconte une histoire différente, offre une manière d’être au monde.

Dans le souci de sauvegarder le jargon authentique utilisé par les acteurs de la pêche, nous avons jugé nécessaire d’élaborer un lexique de l’espace et du temps afin de consigner les termes, les expressions, les dictons relatifs à l’activité de pêche dans les communautés vivant sur les côtes du pays, et principalement dans la langue de Barbarie.

Tout en analysant l’ensemble des marqueurs syntaxiques et lexicaux liés au lieu, à l’espace et au temps dans le wolof de la communauté des pêcheurs de Guet-Ndar, nous allons examiner les outils qui expriment conjointement l’espace et le temps et les divers éléments naturels et surnaturels, les rites et rituels servant de repères ou entrant dans le repérage du temps et l’espace avant, pendant et après la navigation.

Nous analyserons aussi dans cette présentation l’évolution du lexique de la pêche et les facteurs engendrant à la fois des pertes et des enrichissements, notamment avec l’urbanisation et la migration qui ne laissent pas en rade cette communauté traditionnelle de pêcheurs.

Références bibliographiques
Calvet, L.-J. 1999. Pour une écologie des langues du monde. Paris : Plon
Evans, N. 2012. Ces mots qui se meurent, les langues menacées et ce qu’elles ont à nous dire. Paris : La Découverte. Naim, S. (dir.) 2006. La rencontre du temps et de l’espace. Approches linguistique et anthropologique. SELAF 433. Paris : Peeters.
Pottier, B. 2000. Représentations mentales et catégorisations linguistiques. Louvain/Paris : Peeters.


Rural to urban displacement: Loss of linguistic variation and African history
Ronald P. Schaefer
University of Southern Illinois Edwardsville
Francis Egbokhare
University of Ibadan

Massive population displacements from rural to urban settings are projected by year 2100. Accompanying this world-wide movement of people will be significant language shifts. Particularly affected will be minority, rural languages in the multilingual countries of sub-Saharan Africa (Lall et al. 2017), most of which belong to the Niger-Congo phylum, rely on tone to express fundamental notions of tense and aspect (T- A), have no recorded history, and are linguistically undocumented. Not only will individual languages decline, but information about genetically related languages, intra-group variation and historical evolution, will disappear.Against this background and with limited available documentation, we assess the current state of T-A expression in the 25-30-member Edoid group of southern Nigeria. Overwhelmingly rural, Edoid stretches north to south through hill country, savanna, rainforest, and island delta areas immediately west of the Niger River. Its least described members occupy the north hill country.

To guide our presentation, we utilize structural templates that articulate fundamental relations between tones expressing T-A and basic clausal units. Both subject pronoun and verb receive their tone from right adjacent tonal positions that, respectively, express tense and aspect. These tones appear either in combination with vowel segments or as unaccompanied “floating” tones.

A: PRONOUN {TENSE} MODALITY VERB ASPECT B: PRONOUN {TD TENSE} MODALITY VERB ASPECT

Languages associated with template A include Yekhee, Degema, Esan, and Bini, the latter being the most populous of the ethnic groups with some 3 million speakers. Template B is evident in Emai, whose population is approximately 25 thousand.

The principal point of contrast between our Edoid templates concerns the grammatical category tense and its grammatical complexity. Tense can be simple, expressing past, present, or future. Or it can be complex, expressing a time unit in construction with temporal distance (TD). The latter has two values. Proximal for events near moment of speech and distal for events removed in either direction from that moment. Across Edoid, subject pronouns receive their tone from either tense proper or TD, but it is only Emai that relies on TD. Verbs, in contrast, receive their tone from aspect values, which uniformly view event temporal contour either in toto or in part, i.e., perfective vs. imperfective.

Additional tonal variation prevails across Edoid expression of T-A categories. Aspect alignment with tone varies for the present, where the verb is either high or low, but not the past or future, where the verb is uniformly high. In contrast, tense categories align with tone more unevenly. Subject pronoun tone is high or low within each of past, present, and future. We take this tonal variability as evidence that tense is a relatively later addition to the Edoid family. Nonetheless, there is no existing record of how extensive this variation might be and, thus, how tonal coding of tense and aspect might have evolved historically across the Edoid group. These existing deficiencies in our knowledge state can only be exacerbated by the prospect of massive relocation of rural Edoid peoples and their languages to urban centers, much of it projected over the next generation (Seifart et al. 2018, Simons 2019).

References
Harmon, D. & Loh, J. 2010. The index of linguistic diversity: A new quantitative measure of trends in the status of the world’s languages. Language Documentation and Conservation 4: 97-151.
Lall, Somik Vinay, J. Vernon Henderson & Anthony J. Venables (eds.). 2017. Africa’s cities: Opening doors to the world. Washington, DC: The World Bank.
Seifart, Fr.; Evans, N.; Hammström, H. & Levinson, St. 2018. Language documentation twenty-five years on. Language 94(4): 324-345.
Simons, G. F. 2019. Two centuries of spreading language loss. Proceedings of the Linguistic Society of America 4 27: 1-12.
Simons, G. F. & Paul Lewis, M. 2013. The world’s languages in crisis: A 20-year update. In: E. Mihas, B. Perley, G. Rei-Doval & K. Wheatley (eds.) Responses to language endangerment. In honor of Mickey Noonan (Studies in Language Companion Series 142). Amsterdam: John Benjamins. 3–19.


Οι γλώσσες της Κωνσταντινούπολης: γλωσσική πολιτική και εκπαίδευση
Eleni Sella
Université nationale et capodistrienne d’Athènes
Maria Rompopoulou
Université nationale et capodistrienne d’Athènes

Η πολυγλωσσία δεν είναι στατική αλλά δυναμική και εξαρτάται από τις διαφορές ισχύος που επηρεάζουν το καθεστώς των γλωσσών και των ομιλητών τους (Strani 2020). Οι γλώσσες μπορεί να προωθούνται, να υποβιβάζονται, να αμφισβητούνται, να αγνοούνται ή να απορρίπτονται συστηματικά. Ποικίλες έρευνες έχουν αναδείξει τις διαφορετικές εκδηλώσεις της πολυγλωσσίας στα σύγχρονα κοινωνικά και εκπαιδευτικά περιβάλλοντα, καθώς και τις πολιτικές της διαστάσεις, σύμφωνα με τις πολιτικές και τις πρακτικές που ακολουθεί η γλωσσική πολιτική.Σε αυτό το πλαίσιο, το πολιτιστικό και γλωσσικό τοπίο της Κωνσταντινούπολης απεικονίζεται ως ένα «πολιτιστικό/γλωσσικό μωσαϊκό», λόγω των διαφορετικών πολιτισμών που φιλοξενούνται στη μεγαλούπολη αυτή των 15 εκατομμυρίων κατοίκων, όπου (και) σήμερα συμβιούν γηγενείς μειονοτικές γλώσσες, μειονοτικές γλώσσες από όλη την τουρκική επικράτεια, γλώσσες μεταναστών και ‘ξένες’ γλώσσες. Παρά το γεγονός πως ο πολυεθνοτικός, πολυθρησκευτικός και πολυγλωσσικός ιστορικός χαρακτήρας της Κωνσταντινούπολης έχει κατά πολύ συρρικνωθεί, πρόσφατες έρευνες δείχνουν ότι αν και η Τουρκική είναι η γλώσσα με την πλειοψηφία ομιλητών (84%), τουλάχιστον 10 ακόμη γλώσσες ομιλούνται επίσης εντός των συνόρων της Τουρκίας, συμπεριλαμβανομένης της Κωνσταντινούπολης, τον καθρέφτη της χώρας (Tongal 2015; Ceyhan & Koçbas 2011).

Ο προβληματισμός μας αφορά εάν και σε ποιο βαθμό η πολυγλωσσία της κοινωνίας της Κωνσταντινούπολης αντανακλάται στην εκπαίδευσή της. Στην παρούσα εισήγηση θα επιχειρηθεί η χαρτογράφηση του πολύγλωσσου ή μη χαρακτήρα της εκπαίδευσης στην Κωνσταντινούπολη. Αντικείμενο της έρευνας συνιστά η γλωσσική πολιτική η οποία ακολουθείται (α) στα μειονοτικά σχολεία των αναγνωρισμένων Μειονοτήτων (β) στα δημόσια και ιδιωτικά ξενόγλωσσα σχολεία πρωτοβάθμιας και δευτεροβάθμιας εκπαίδευσης και (γ) στα ιδρύματα τριτοβάθμιας εκπαίδευσης. Τα αποτελέσματα της έρευνας θα μας επιτρέψουν να διαμορφώσουμε άποψη σχετικά με τη γλωσσική πολιτική στην εκπαίδευση της Κωνσταντινούπολης.

Βιβλιογραφία
Calvet, L.-J. 2002. Le marché aux langues. Les effets linguistiques de la mondialisation. Paris: Plon.
Ceyhan, Α. M. & Koçbas, D. 2011. Göç ve çokdillilik baglamında okullarda okuryazarlık edinimi. İstanbul: İstanbul Bilgi Üniversitesi. http://www.unipotsdam.de/fileadmin/projects/daf/assets/LAS-Turkey/LAS_AyanCeyhan_Kocbas.
Strani, K., ed. 2020. Multilingualism and politics. Revisiting multilingual citizenship. Edinburgh: Palgrave-Macmillan.
Tongal Ç. 2015. Intercultural education in Turkey: From the rhetoric of “cultural mosaic” to the acknowledgement of diversity in classrooms in doing diversity in education through multilingualism, media and mobility. Ιstanbul: Istanbul Policy Center Sabanci University.
Κακριδή-Φερράρι, Μ. 2022. Γλωσσική πολιτική και γλωσσικός σχεδιασμός, στο: Δ. Γούτσος και Σπ.Μπέλλα (επιμ.) Κοινωνιογλωσσολογία. Αθήνα: Gutenberg. 482-521.


Language policy and economic activity:
Εmerging multilingual practices in companies related to services
Popi Theophanous
Cyprus Ministry of Education, Sports and Youth

The internationalization of the English language (Crystal 1997, 2001), is closely related to the political and socioeconomic developments that marked the beginning of the 20th and the 21st century (Wright 2000). More specifically, the hegemonic or glottophagic tendency (Calvet 1974, 1999) of English as a Lingua Franca (ELF) in economic activities and in the global business arena was repeatedly stressed by many researchers (Rogers 1998; Dhir & Goke-Pariola 2002; Nickerson 2005; Ηaarmann 2005).However, over the last two decades, following increasing mobilities in the EU and internationally, multilingualism emerged as an alternative language scenario in economic domains related to e- commerce and services (Shaoyi 2007). Firms that are exclusively working electronically have been among the first to appreciate the use of languages other than English to approach a wider audience. Moreover, firms that operate in the services domain incorporate multilingualism in their strategic planning so as to approach clients in a more direct way.

The goal of the present paper is to present findings from a recent research on language policy in the business domain. Employing Spolky’s (2002, 2009) and Shohamy’s (2006) theory, language policy is presented as a threefold activity with three components: language beliefs, language practices and language management. The data collected demonstrate how multilingual practices are closely connected to the type of Economic Activity, the specificities of interpersonal communication and the wider corporative philosophy of the enterprise (Lüdi et al. 2013, Theophanous 2015, Theophanous & Karyolemou forthcoming). Also, how the overall language policy of the company, has an immediate effect in the semiotic appearance of the working place and in the linguistic landscape of the city.

References
Calvet, L.-J. 1974. Linguistique et colonialisme: petit traité de glottophagie. Paris: Payot. Calvet, L.-J. 1999. Pour une écologie des langues du monde. Paris: Plon.
Crystal, D. 1997. English as a Global Language. Cambridge: Cambridge University Press. Crystal, D. 2001. Language and the internet. Cambridge: Cambridge University Press.
Dhir, K. & A. Goke-Pariola. 2002. The case for language policies in multinational corporations. Corporate Communications: An International Journal 7(4): 241-251.
Haarman, H. 2005. Multiple foreign language choices in response to varied economic needs. Sociolinguistica 19: 50–57.
Karyolemou, M. 2013. Politiques linguistiques et plurilinguisme à Chypre. In: J.-C. Herreras (ed.) Politiques linguistiques en Europe. Valenciennes: Presses Universitaires de Valenciennes. 41-72.
Rogers P. S. 1998. National agendas and the English divide. Business Communication Quarterly 61(3): 79–127.
Lüdi, G.; Höchle Meier, H. & Yanaprasart, P. 2013. Multilingualism and diversity management in companies in the Upper Rhine Region. In: A. C. Berthoud; F. Grin & G. Lüdi (eds.) Exploring the Dynamics of Multilingualism. The DYLAN project. Amsterdam, New York: John Benjamins. 59-82.
Nickerson, C. 2005. English as a lingua franca in international business contexts. English for specific purposes 24(4): 367–380.
He, Sh. 2007. Internet multilinguality: Challenges, dimensions and recommendations. In: K. St. Amant (ed.) Linguistic and cultural online communication issues in the Global Age. Hersley, London, Melbourne, Singapore: IGI Global. 1-14.
Shohamy, E. 2006. Language policy: hidden agendas and new approaches. London: Routledge. Spolsky, B. 2009. Language management. Cambridge: Cambridge University Press.
Spolsky, B. 2004. Language policy. Cambridge: Cambridge University Press
Theophanous, P. 2015. Language policy and economic activity: the case of three Cypriot companies. Unpublished PhD thesis. University of Cyprus, Cyprus.
Theophanous, P. & Karyolemou, M. (forthcoming) From local to global and back again: Language use in corporate communication. Mediterranean Language Review.
Wright, S. 2004. Language policy and language planning. From nationalism to globalization. London, New Work: Palgrave.


Après la mondialisation la démondialisation ?
Entretien avec Louis-Jean Calvet sur l’avenir des langues
Sandra Tomc
Université Jean Monnet, ECLLA
Marine Totozani
Université Jean Monnet, ECLLA
Valeria Villa-Perez
Université Jean Monnet, ECLLA
En nous situant dans le contexte mouvant du monde actuel et l’hypothèse d’une « démondialisation » explorée jusqu’à présent dans différentes sciences sociales, il s’agira de développer une réflexion sociolinguistique sur les effets de ce phénomène. On l’aura compris, notre proposition a une dimension fictive et projective : nous postulons que cet exercice de « futurologie sociolinguistique » (Berruto 2006 : 101) révèle l’existence de mouvements centripètes et centrifuges.C’est dans ce cadre que nous nous demanderons : quel avenir pour les langues dans un contexte démondialisé ? Ce parcours se fera en cheminant avec Louis-Jean Calvet : nous avons imaginé un entretien fictif avec le chercheur, basé sur un jeu de questions/réponses hypothétiques rédigées en partant de ses ouvrages (1987, 1999, 2017), de données fournies par le baromètre des langues dans le monde (Calvet & Calvet 2017) et d’éclairages apportés par L.-J. Calvet lui-même lors d’un dialogue que nous aimerions engager avec lui pendant notre communication.
Sans prétention d’exhaustivité, les ouvrages ont été sélectionnés à partir d’une approche historicisée et histoiricisante de la question posée sur l’avenir des langues.

Bibliographie
Bello W. 2011. La démondialisation. Idées pour une nouvelle économie mondiale. Paris : Le serpent à plumes.
Berruto G. 2006. Quale dialetto per l’Italia del Duemila ? Aspetti dell’italianizzazione e risorgenze dialettali in Piemonte (e altrove). In A. Sobrero & A. Miglietta (éds) Lingua e dialetto nell’Italia del duemila. Galatina : Congedo Editore. 101-127.
Calvet L.-J. 1987. La guerre des langues et les politiques linguistiques. Paris : Payot. Calvet L.-J. 1999. Pour une écologie des langues du monde. Paris : Plon.
Calvet L.-J. 2017. Les langues : quel avenir ? Les effets linguistiques de la mondialisation. Paris : Biblis.


La dynamique actuelle de l’arvanitika en Grèce
Maria Tsigou
Université Ionienne

L’arvanitika est une langue à tradition orale présente sur le territoire grec depuis plusieurs siècles et sérieusement menacée de disparition depuis quelques décennies. C’est la langue minoritaire la plus ancienne sur le sol grec et la plus étudiée du point de vue sociolinguistique (voir, entre autres, Tsitsipis 1981, 1983, 1995, 2005; Trudgill & Tzavaras 1975; Trudgill 1983). Selon l’Atlas de l’Unesco, l’arvanitika est dispersé essentiellement en Grèce méridionale et centrale (Attique, Cyclades, Eubée, îles du golf Saronique, Péloponnèse, Béotie). Le nombre actuel des locuteurs de la langue n’est rapporté que sous forme d’estimations (p.ex. l’Atlas de l’Unesco adopte l’estimation de Sasse (1991) qui fait état de 50000 locuteurs), comme le dernier recensement de la population grecque contenant une question sur la langue maternelle pratiquée au foyer date de 1951.Les études sociolinguistiques effectuées dans le passé montrent que les attitudes linguistiques des locuteurs sont plutôt négatives envers la langue, ce qui constitue l’un des principaux moteurs de sa menace de disparition. Selon Tsitsipis (2005), parmi les facteurs qui ont contribué à l’émergence d’une attitude idéologique fortement négative au sein même des communautés arvanitophones sont la modernisation de la société grecque, la scolarisation obligatoire, le développement des transports, les masses médias et le rôle du grec en tant que langue officielle du pays. Dans la présente communication, je vais présenter les résultats d’une enquête menée auprès des arvanitophones et des locuteurs d’origine arvanite pour essayer de comprendre : quelle est la dynamique actuelle de l’arvanitika en Grèce, si sa dynamique est la même dans les différentes communautés arvanitophones dispersées dans le pays et pourquoi ? Dans cette perspective, je souhaiterais interviewer des locuteurs d’arvanitika dans les environs d’Athènes et dans les régions rurales pour comprendre si les facteurs de maintien ou d’abandon de cette langue minoritaire ont évolué et dans quelle direction depuis les dernières recherches effectuées quelques décennies auparavant.

Références bibliographiques
Trudgill P. 1983. On dialect: Social and geographical perspectives. Oxford: Basil Blackwell.
Trudgill P. & Tzavaras G. 1975. A sociolinguistic study of Albanian dialects spoken in the Attica and Biotia areas of Greece. Report to the Social Science Research Council. London: Social Science Research Council.
Tsitsipis L. 1983. Language shift among the Albanian speakers of Greece. Anthropological Linguistics 25(3): 288-308
Tsitsipis L. 1995. Introduction à l’anthropologie de la langue. Athènes : Gutenberg [en grec].
Tstsipιs L. 1998 A Linguistic anthropology of language and shift. Arvanitika (Albanian) and Greek in contact. Oxford: Clarendon Press
Tsitsipis L. 2005. De la langue comme objet à la langue comme action. Athènes : Nisos [en grec] Atlas de l’Unesco http://www.unesco.org/languages-atlas/index.php


Space, variation, translanguaging on the walls of a divided city
Stavroula Tsiplakou
Open University of Cyprus
Linguistic landscapes attract considerable research interest, not least because of the rich semiotic import of the texts involved, which stems from their relation to the dynamics of (urban) space and from their function as linguistic shapers of (particular socioculturally embedded representations of) space, jointly with other semiotic resources such as architecture, urban construction, visible and covert aspects of human geographies, etc. This paper is a first attempt to chart aspects of the urban linguistic landscape of Nicosia, the capital of the Republic of Cyprus and Europe’s last divided city. The focus is on texts collected from the inner-city areas of Phaneromeni and Taht-el-kale, which are adjacent to the ‘dead zone’, the UN buffer zone dividing the northern and the southern part of the city; these are areas that display dereliction but also recent attempts at gentrification; texts include political slogans, advertisements for rallies or local festivals, graffiti, posters etc., which feature (i) aspects of the Cypriot Greek dialect, a variety of Greek that is still by-and-large banned from the public domain given the diglossia between Cypriot and Standard Greek (Hadjioannou et al. 2011), a particularly interesting aspect being the way in which the absence of a standardized writing system for the dialect is capitalized on for indexical purposes; (ii) dense code-mixing between Standard Greek, Cypriot Greek and English; (iii) purposefully ungrammatical structures; (iv) overt subversions of formal writing conventions at large. In terms of methodology, a micro-level linguistic analysis of individual texts and of particular instances of linguistic and orthographic bricolage or translanguaging/superdiversity is proffered (cf. Blommaert 2013; Pennycook 2010) and an attempt is made to explore their import as indexicals of ideologies constructing inner-city spaces as settings for specifically politicized, counter-normative facets of ‘glocal’ identities.References
Blommaert, J. 2013. Ethnography, superdiversity and linguistic landscapes. Chronicles of complexity. Clevedon: Multilingual Matters.
Hadjioannou, X.; Tsiplakou, S. & Kappler, M. 2011. Language policy and language planning in Cyprus. Current Issues in Language Planning. 1-67.
Pennycook, A. 2010. Spatial narrations: Graffscapes and city souls. In: A. Jaworski & C. Thurlow (eds). Semiotic landscapes: Language, image, space. London: Continuum. 137-151.


De la politique linguistique à la « politologie linguistique » de Louis-Jean Calvet (2002) : héritage et appropriation d’un changement de paradigme.
Amélie Leconte
Aix-Marseille Université

En 2002, dans son ouvrage Le marché aux langues : essai de politologie linguistique sur la mondialisation, Louis-Jean Calvet propose un changement de paradigme important et, en filigrane, ne nous invite à rien de moins qu’a la fondation d’une nouvelle (sous-)discipline ! Le syntagme politologie linguistique est ainsi propose pour « faire le départ entre un ensemble de pratiques (les politiques) et l’analyse de ces pratiques (la politologie, ou science politique). » Il affirme ainsi « l’existence d’une politologie linguistique qui elle-même implique que nous définissions son objet d’étude et ses instruments. L’objet d’étude de la politologie linguistique est donc constitué par les interventions sur les situations linguistiques. » (Calvet, 2002 : 22).En 2014, sous la direction de Calvet, je soutenais une thèse intitulée « La fabrique des politiques linguistiques scolaires », fruit d’une étude sur la politique d’éducation bilingue et interculturelle au cœur du système éducatif indigène mexicain (Leconte, 2014). Essentiellement intéressée par les questions d’ordre épistémologique, je partais de la proposition de Calvet et explorais le potentiel de ce changement de paradigme mais aussi les enjeux et les implications théoriques et méthodologiques de ce qui pour moi correspondait au passage de la « politique linguistique scolaire » à la « politologie linguistique scolaire ». En postulant que « [t]oute discipline pour fonder sa légitimité doit poser son identité, une identité qui la distingue des autres disciplines » et qu’« une discipline se définit moins par son objet, qu’elle peut partager avec d’autres, que par son point de vue sur cet objet » (Maingueneau, 1998), il fallait alors penser ce que pouvaient être l’identité et les spécificités du « point de vue » de ladite « politologie linguistique scolaire » sur les « interventions sur les situations linguistiques ».

Dans cette communication, je propose d’approfondir cette question et de revenir sur la manière dont moi-même mais aussi les chercheurs de ma génération se sont approprié cette « petite graine » plantée par Louis-Jean Calvet.

Bibliographie
Leconte, A. 2014. La fabrique des politiques linguistiques scolaires. La politique d’éducation bilingue interculturelle du Mexique et du Jalisco. Thèse sous la direction de Louis-Jean Calvet, Université de Provence.
Maingueneau, D. 1998. Les tendances françaises en analyse du discours. Compte rendu de la conférence donnée à l’Université d’Osaka le 12 novembre 1998 [en ligne]


Les odonymes de l’ancienne ville de Boussaâda : une autre forme de transmission de l’Histoire locale
Lynda Zaghda
Université de M’sila

Pendant de longs siècles les récits historiques étaient les ouvrages par excellence du passé et de l’Histoire des hommes. Cette croyance est bouleversée par les recherches en toponymie, étude scientifique des noms de lieux qui vise à retrouver l’étymologie et le sens des noms de lieux, qui font du toponyme un code d’accès à la mémoire collective transmise par voie orale. En effet, l’espace occupé qui joue un rôle fondamental et particulier dans l’expérience physique et psychique des individus, peuvent refléter au travers de leurs dénominations, un certain rapport à l’espace occupé.Nous nous intéressons aux odonymes de l’ancienne ville de Boussaada pour comprendre comment ces dénominations peuvent révéler une partie de l’Histoire d’une région. Quel est l’héritage odonymique de Boussâda ? Quel est l’impact des différentes invasions sur le système de dénominations de cette ville ? Quels sont les autres facteurs qui ont impacté le système toponymique de Boussaâda? Ce sont autant de questions auxquelles nous ambitionnons de répondre pour comprendre des espaces délaissés à la fois par les historiens et les linguistes algériens.

L’objectif d’une recherche toponymique est souvent le relevé systématique des différents toponymes existant dans la mémoire collective. À cet effet, nous avons pris soin de faire des relevés des noms des lieux dans la ville de Boussaâda. Notre corpus est constitué de noms anciens et contemporains de lieux de l’ancienne ville de Boussaâda que nous avons expliqués et interprétés pour dégager les régularités qui caractérisent les bases toponymiques de chaque couche historique. Il s’agit particulièrement d’odonymes.

Les toponymes ont été recensés en deux étapes : nous avons d’abord procédé à un relevé des noms des différents quartiers de la sphère géographique de l’ancienne ville de Boussâda ou se trouvant dans des ouvrages portant sur l’Histoire de cette ville. Par la suite, nous avons réalisé des entretiens semi-directifs auprès de personnes habitant ou ayant habité les anciens quartiers de cette ville.

Références bibliographiques
Bailleul, H. 2009. Aborder le rapport à l’espace dans sa dynamique : les représentations spatiales de l’habitant à l’épreuve des projets urbains. Dans 2èmes journées scientifiques de l’ARPenv (Association pour la Recherche en Psychologie Environnementale). Nimes : Université de Nîmes. Repéré sur https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00722997/document
Benremdhane, F. 1999. Espace, signe et identité au Maghreb. Du nom au symbole. Insaniyat 9. Récupéré sur https://journals.openedition.org/insaniyat/8250
Calvet, L.-J. 2021. La ville. Dictionnaire de la sociolinguistique. Langage et société, hors-série : 341-344. Depois, J. 1953. Le Hodna. Paris: Presses Universitaires de France.
Dozy, R. P. A. [1927] 2018. Supplément aux dictionnaires arabes (2e édition). Paris: Hachette. Ibn Khaldoun. 2015. Les Prolégomènes. Paris: Broché.
Levi-Strauss, Cl. [1990] 2010. La pensée sauvage. Paris: Pochet.
Yermeche, O. 2018. Les dénominations de lieux en Algérie : entre toponymie coloniale, toponymie(s) officielle(s) et toponymie(s) spontanée(s). Études et Documents Berbères 39-40. 387- 400. Récupéré sur https://www.cairn.info/revue-etudes-et-documents-berberes-2018-1.htm